Page:Bulletin de la Commission départementale des monuments historiques du Pas-de-Calais, tome 6, 1935.djvu/186

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grand-prieur de Ligne fit la belle plate-forme que nous appellons la première terrasse, et l’entoura de la muraille solide qui la soutient encore aujourd’hui. Sous son administration, un sculteur de Lille exécuta les formes qui existent dans notre chœur. Quoiqu’elles ne soient plus du goût du jour, elles ont leur mérite pour la beauté et le fini des figures de saints qui remplissent les cartouches de chaque forme. Celui qui les fit se nommoit Franchomme. L’ornement et les deux chappes brodées, qu’on fait servir pour les jours de Vierge, ont été fournis par le même prieur, qui fit aussi paver le chœur en marbre. Ce même pavé sert encore aujourd’hui dans le chœur de notre nouvelle église. On connoît les chapelles bâties en grés sur le chemin de Saint-Eloy à Bertonvalle et sur la chaussée Brunehaut, près du bois, qu’on nomme Chapelle de Monsieur de Ligne. Ce digne prieur, après avoir très bien gouverné la maison, mourut le 27 janvier 1704 ».

« En 1725, Monsieur Clause, peintre établi à Valenciennes, acheva en 21 mois le beau tableau représentant le Lavement des pieds, qui est placé au-dessus de la cheminée du réfectoire. On lui donna 4 mille 200 livres le 22 de décembre pour ce tableau, où Monsieur de Le Cœuillerie et toute sa communauté sont rendus supérieurement. Les connoisseurs ne se lassent pas de louer ce tableau ; ils y voient des têtes dignes de Rubens et ils y admirent la touche ferme et hardie des plus grands maîtres. Il est fâcheux que Clause soit mort peu de temps après avoir peint ce tableau ; il est certain qu’il eût acquis beaucoup de célébrité dans son art s’il avoit vécu plus longtemps » (p. 161°;

« Le même abbé fit faire l’horloge et le carillon qui se trouve dans la première tour de notre église, par le nommé Lambert, fondeur à Lille, ce qui coûta bien 40 mille francs  ».

Dominique Toursel, abbé de 1727 à 1733 (p. 164), fit faire à Douay par Monsieur Gérard, orfèvre de cette ville, les deux bustes magnifiques qui décorent notre autel ; il déposa dans l’un la vertèbre de Saint Vaast et dans l’autre l’os de Saint Eloy, qu’on lui avoit envoyés à cette occasion. Il fit entourer de grilles le sanctuaire de son église ; ces grilles étoient belles pour leur temps ; leurs débris servent encore aujourd’hui à fermer l’entrée des tours et les deux nefs de notre chœur. Il fit aussi paver le sanctuaire de son église de beaux carreaux de marbre, qui sont employés aujourd’hui à celui de notre nouvelle église. La belle croix d’argent qui est au-dessus de notre tabernacle a été faite par les ordres de M. l’abbé Toursel ».

Il bâtit le quartier abbatial, qui, dit D. Wartel, « sert aujourd’hui de quartier pour les étrangers » et qui « servit de modèle et de règles pour les édifices bâtis depuis ».

Vindicien Roussel, 1733-1753 (p. 169) est le grand reconstructeur du monastère. « Il n’y avoit dans la maison que le quartier abbatial qui présentoit un logement propre et commode ; le reste de la maison n’offroit que de vieilles masures bâties haut et bas, sans aucun ordre ni proportion ; les grés qui dominoient dans la structure de tous ces bâtimens les rendoient humides et malsains. Les religieux proposèrent à Monsieur Roussel de rebâtir toute la maison. - « Je veux bien », dit-il, « mais voulez-vous manger des briques ?  » - « Nous ferons en sorte que tout aille bien », répondirent les religieux, et Monsieur l’abbé acquiesça à leurs prières... ».

« Sire Killien Gruyelle, Me des novices (p. 170), avoit pris du goût pour les bâtimens en voyant les ouvriers travailler au quartier abbatial. Il avoit aussi distingué un maître maçon, nommé André Merville, natif de Marœuil. Il l’appela, lui fit faire les plans. Ce maçon prouva la vérité du proverbe : Fabricando, fabri fimus ».