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Quant aux soldats, ils furent tous désarmez et envoyez nuds sans manteau avec un baston blanc au poing : encore on leur fit ce bien de les conduire trois lieues loin de la ville, de peur que le peuple des environs ne se jetassent sur eux. On mit cent soldats pour garder ceste place tirez des régimens de Picardie, Navarre et Beaumont, en attendant que le Roy y eust pourvu d’un gouverneur.

Ainsi Lézonnet perdit son gouvernement de Conquerneau que le Roy a donné depuis au sieur de l’Isle Rouhé[1].


X.

Remarquez ce trait de la narration qui précède, car il est significatif : il faut faire escorter jusqu’à trois lieues les soldats qui sortent désarmés ; autrement ils seraient massacrés par les paysans. Et pourtant ces soldats n’ont pas fait une résistance sérieuse : loin de là, ils ont lâchement, on peut le dire, livré leur chef et ont ouvert la place ; mais les paysans ne leur tiendront pas compte de leur soumission aux conseils des officiers du Roi, ils feront main basse sur eux : ils ne voient en eux que des complices d’une rébellion ; or ils ne veulent plus même l’apparence d’une guerre ; leur amour de la paix se tourne en fureur. Les pauvres gens ont tant souffert, il y a vingt-cinq ans à peine, des troupes de l’un et de l’autre parti[2] !

  1. Le sieur de l’Ile Rouhé… De son nom Pierre-Joseph de la Béraudière. Il a signé plusieurs actes aux registres paroissiaux de Concarneau. Il prend dans ces actes le titre de Baron de Roué. M. de Courcy donne aux La Béraudière les titres de baron de Rouhet et de marquis de l’Ile-Jourdain. De là peut-être l’indication donnée par le Mercure : l’Isle-Roué.
    Le nom de ce gouverneur apparaît pour la première fois aux registres de Concarneau en 1630 ; mais il n’est pas douteux que sa nomination de gouverneur a suivi de près le siége. La preuve, c’est que le Mercure qui la mentionne a été imprimé en 1621.
  2. Il faut lire sur ce point Moreau et Montmartin. Je leur ai emprunté quelques traits dans Le Siége de Crozon. Revue de Bretagne, de Vendée et d’Anjou.