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drait pas la question l’important est de savoir comment la troupe a gagné l’ouest de la France en venant du nord.

Deux itinéraires sont possibles le premier, par Amiens, Abbeville, Dieppe, Rouen, Evreux (ou Le Havre, Caen), atteint Alençon et Le Mans l’autre, par Saint-Quentin et la Champagne, atteint Sens et Or)éans. J’inclinerais à croire que Bernardy a pris la route du nord. Nous possédons, pour l’année 1776, une comptabilité assez précise des recettes du théâtre de Saint-Quentin on n’y trouve aucune trace d’un spectacle d’enfants (j, p. 127) d’autre part le théâtre de Troyes, incendié en 1775, n’a été reconstruit qu’en 1780 voilà donc deux villes importantes de l’itinéraire du sud où les petits comédiens n’auraient pas joué c’est peu vraisemblable.

H y a pourtant, contre l’itinéraire normand, une objection assez forte venant par ce chemin, Bernardy aurait dû passer au Mans d’abord, à Angers ensuite, alors qu’il fait tout le contraire. Sans doute une troupe ordinaire n’aurait pas compliqué comme à plaisir son parcours mais une troupe d’enfants, qui ne pouvait pas s’arrêter longtemps, pouvait au contraire avoir intérêt à revenir sur ses pas, à visiter plusieurs fois les mêmes villes, pour profiter du souvenir gentil qu’elle avait laissé. S’il a gagné Angers par Rouen, Bernardy n’a pas quitté la région alors desservie par la Montansier, et le fait ne serait pas sans importance. Cette commerçante avisée, qui voyait grand et qui n’était pas dénuée de sens artistique, avait certainement connu les petits comédiens en Picardie se serait-elle intéressée à cette école d’application ambulante ? Aurait-elle senti que des sujets d’avenir pouvaient s’y révéler ? Auraitelle pris, en quelque sorte, Bernardy sous sa protection, intercalant ses représentations entre celles de ses propres troupes, lui facilitant les déplacements et les relations avec les autorités, mettant ses jeunes étèves à même de voir travailler un personnel qu’elle savait choisir ? Ce passage de Bernardy dans l’ouest serait-il une page curieuse dans l’histoire de l’art du comédien et de son enseignement ? Toutes ces questions, à l’heure actuelle, sont bien aventureuses, mais elles le paraîtraient peut-être moins si nous pouvions arriver à savoir ce que fit notre homme en 1776 et 1777, dans quelles villes on s’amusa de ces jeunes premiers qui jouaient aux billes, de ces duègnes qui devaient avoir une poupée dans leur petit bagage.

Une année se passe à nouveau, pendant laquelle nous perdons de vue ce petit monde. Nous le retrouvons en Provence au début du printemps de 1779 le 21 mars, les petits comédiens sont à Aix « depuis quelque temps disent les Affiches de Provence le 27, ils font la clôture, et