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Page:Bulletin de la société des sciences historiques et naturelles de la Corse, fasc. 352-354, février 1913.pdf/127

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Théodore de Neuhoff

tiliser l’influence du personnage ; elle prépara même une expédition qu’il devait conduire mais qui ne partit pas. La cour de Vienne se vengea de l’homme qui l’avait déçue ; elle le fit simplement expulser de Toscane et diriger sur la Westphalie (1747).

Théodore était désormais discrédité partout. Son rôle politique était fini, bien qu’il refusât d’abdiquer. Retiré à Londres et reçu pendant quelque temps dans la haute société, qui voulait satisfaire surtout sa curiosité, il fut bientôt emprisonné pour dettes. Après six ans de détention, bafoué par les uns, renié par les autres, il comparut devant un tribunal qui lui rendit la liberté « en échange de son royaume de Corse  » qu’il abandonnait aux créanciers. Théodore vécut encore un an, rejeté en prison, libéré une dernière fois, loqueteux et affamé, accueilli charitablement par un malheureux tailleur, chez lequel il mourut le 11 décembre 1756, échappant à une vie d’intrigues et d’aventures, non aux railleries posthumes de Walpole, de Voltaire et des comédiens.

C’est ainsi que se termine le récit de M. le Glay. On le suit avec plaisir car il est écrit d’un style alerte et sans que l’indication détaillée des sources fatigue en aucune façon le lecteur. L’ouvrage est assurément le meilleur qui ait été écrit depuis longtemps sur le compte du seul Roi qu’ait eu la Corse ; il met en œuvre presque tous les documents contenus dans notre Bulletin et beaucoup de pièces d’archives inédites, puisées à Gênes, à Turin ou à Paris. C’est dire qu’il possède une réelle valeur historique. Sans doute quelques unes des affirmations de M. le Glay nous semblent aventurées et nous lui reprocherions presque d’avoir trop mal parlé de son héros, qui ne fut pas seul responsable des échecs subis par les Corses de 1736 à 1740 ; vraisemblablement les chefs de la révolte et les révoltés eux-mêmes secondèrent mal leur