Page:Bulletin de la société géologique de France - 1re série - 3 - 1832-1833.djvu/298

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Dans une question comme celle des cratères de soulèvement, qui divise aujourd’hui les principaux géologues de l’Europe, il est nécessaire que chacun apporte les lumières de son expérience, et la somme des résultats acquis par l’observation des faits.

J’ai donc pensé qu’il serait important de relever les erreurs sur lesquelles M. Léopold de Buch, et avec lui les géologues qui ont adopté sa brillante théorie, semblent s’appuyer pour regarder l’île de Santorin comme offrant à la fois l’un des plus beaux, des plus entiers et des plus réguliers cratères de soulèvement qui aient encore été décrits.

Sans prétendre m’ériger ici en juge d’une aussi grande question, je ferai observer que M. de Buch, dans une théorie aussi spéculative que celle des cratères de soulèvement, a eu, au moins selon moi, le tort de considérer cette île, qu’il n’a point visitée lui-même, comme l’un des points les plus instructifs sur lesquels il prétend appuyer sa théorie.

Après avoir visité cette île intéressante, j’ai long-temps médité sur sa formation, et j’avoue que je n’ai jamais pu voir dans le golfe presque circulaire, d’environ deux lieues de diamètre du S. au N., et d’une lieue et demie seulement de l’E. à l’O., que présentent les trois îles de Santorin, Therasia et Aspronisi, autre chose qu’un immense cratère d’éruption, qui présente en grand le phénomène que l’île Julia nous a fait voir tout récemment sur une plus petite échelle. Ces îles, qui faisaient partie du cratère, sont principalement composées de lits de tufs et d’agglomérats trachytiques, accumulés en très grand nombre les uns au-dessus des autres, et formant des couches interrompues, plus ou moins puissantes, comme le présenterait la section d’un volcan qui vomit des laves tantôt d’un côté, tantôt de l’autre, de manière à offrir une suite de coulées souvent plutôt mariées entre elles que superposées les unes aux autres, suivant leur ordre de sortie. M. de Buch a surtout appuyé sur le caractère prétendu négatif, qu’au milieu de tant de déjections ou de dépôts incohérens, aucune lave n’avait jamais coulé ; c’est une erreur résultant sans doute du peu d’attention que les observateurs qui ont visité Santorin paraissent avoir portée à la succession de ces dépôts ; car, bien que les déjections de matières liquides aient été beaucoup moins fréquentes que les déjections de matières meubles, il n’en est pas moins constant que celles-ci sont mélangées de véritables coulées trachytiques, qui ont si bien coulé, que quelques unes sont remplies de nombreuses vacuoles allongées, précisément dans le sens de leur direction : elles se présentent à