Page:Bulletin religieux de l’archidiocèse de Rouen, année 7, numéro 38, 19 septembre 1908.djvu/11

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conscience insiste, si elle vous persuade de préserver par tous les moyens l’âme de votre enfant, alors c’est vous qui tomberez dans un délit légal, pour lequel vous ne serez pas épargnés.

Une pareille législation revient à l’expropriation de la famille et à la confiscation de l’enfant : de toutes les tyrannies, c’est la plus odieuse.

Pères de famille, nous devions vous mettre sous les yeux ce douloureux état de choses.

En suite de quoi, nous voulons vous rappeler encore, en quelques mots, vos droits et vos devoirs.

Tout d’abord, contrairement à la doctrine césarienne qui prétend que l’enseignement public est donné exclusivement au nom de l’État, nous vous disons, nous, vos Évêques, qu’il l’est, qu’il doit l’être principalement au vôtre. L’élève, l’enfant ne commence pas par appartenir à l’État, il est à vous. Quand il aura grandi, lorsqu’il aura pris son essor de citoyen, l’État, alors, lui demandera directement sa part de contribution au service du bien social. Mais aussi longtemps qu’il n’est qu’un enfant, c’est de la famille qu’il relève avant tout : celle-ci, en l’élevant, continue de le mettre au monde. Que dans votre tâche d’éducateurs naturels l’État s’offre à vous aider, qu’il vous supplée au besoin, soit ! mais qu’il ne pense jamais à vous supplanter. Qu’il ouvre des écoles, qu’il rédige des programmes, qu’il indique quelles connaissances, au jugement des gens compétents, doivent être, comme il dit, « le viatique intellectuel nécessaire à la mise en valeur de la personne humaine », nous l’acceptons. Loin de nous de songer à lui contester le rôle qui est le sien, de diriger l’enseignement de manière à pourvoir, soit aux besoins généraux de la société, soit à la plus grande utilité de ses membres. Ce que nous demandons, c’est qu’en toutes les formes de ses initiatives et de ses concours, il ne perde jamais de vue le droit primordial de la famille. L’État peut faire des maîtres d’école qui enseignent l’écriture, le calcul, l’histoire, la géographie, les sciences : quant au maître de l’école, en ce qui concerne la formation morale de l’enfant, c’est Dieu qui le fait : et vous l’êtes, vous, Pères de famille, par Celui qui vous a faits pères. Là encore, que l’État vous aide, qu’il vous fasse aider : qu’il n’ose pas se substituer.

La Sainte Église est la grande auxiliaire, d’institution divine, vous le savez, Pères de famille chrétiens. À partir du Baptême, auquel vous les avez librement présentés, vos enfants sont ses fils spirituels, et, en sa qualité de mère, elle réclame le droit de vous aider, elle aussi, à les élever.