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Page:Bulletins de la classe des lettres et des sciences morales et politiques, 1919.djvu/13

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de l’agression, sa dignité de citoyen et sa conscience d’homme libre. Sauf une poignée de traîtres, dont l’abjection intellectuelle explique peut-être, sans l’excuser, l’abjection morale, il nous a paru évident dès le premier jour que ce qui était en question, c’était, avec le droit du peuple de disposer de soi-même, ce qu’il y a de plus sacré en ce monde : la fidélité à la parole donnée, la religion de l’honneur et le respect de la justice. C’est aussi tout cela qui vient de triompher, et la Belgique reprend sa place au milieu des nations, glorieuse d’avoir souffert, lutté et vaincu, non seulement pour elle-même, mais pour le principe essentiel de toute civilisation. Justicia fundamentum regnorum. Il n’est pas de joie plus haute et plus pure que celle d’une victoire qui répond aussi complètement que celle-ci aux aspirations de la conscience. Et nulle part, sans doute, elle ne sera ressentie avec plus d’allégresse que parmi nous, puisque aussi bien la mission de notre Compagnie est l’étude de ces grands problèmes d’histoire, de politique et de morale dont jamais la portée ne s’est révélée aussi pleinement que durant les années tragiques qui viennent de prendre fin.

Je parle de nos sentiments, Messieurs, et je me sens malheureusement incapable d’exprimer, comme je le voudrais, le plus puissant de tous. Comment traduire, en effet, sans les déflorer, l’admiration, la vénération, la reconnaissance qui, de nos cœurs comme de ceux de tous les Belges, montent vers notre Roi et vers notre Reine ? Par un bonheur inouï, il s’est trouvé qu’au moment même où se jouaient ses destinées, la Nation a rencontré en eux des vertus si hautes et un si pur héroïsme que, de se savoir personnifiée ainsi devant l’ennemi comme devant le monde, son courage s’en est trouvé décuplé. Aux soldats de dire ce que notre Roi a été pour eux dans les tranchées, sous les balles, derrière les parapets, ce que la Reine leur a apporté de réconfort, et ce que le sillage de sa robe blanche d’infirmière a remué dans les hôpitaux d’espérances et de consolations. De ce côté-ci de l’Yser, tous ceux