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un voyage

personne probablement sympathique, que, de la croisade il ramena, et installa chez lui. L’étrangère vécut en fort bons termes avec la première occupante du lieu. Celle-ci, comme la femme du bourgeois de Bruges, dont M. Barrès nous conte l’histoire, avait évidemment un cœur facile. Sans doute ce fut une mode plus répandue que nous le soupçonnons, de ramener du saint voyage de chères créatures. Sans doute aussi, les croisés, ou même seulement les grands « globe-trotters » du temps, avaient–ils un tel prestige aux yeux des épouses sédentaires, qu’elles acceptaient joyeusement toutes les combinaisons que, après ces grandes fatigues, ils jugeaient favorables à leur bonheur. J’apprendrais avec plaisir que les deux dames survécurent au comte de Goschen, et j’aimerais à savoir ce qu’elles se dirent alors, tête à tête.

Dans le chœur, il y a de belles stalles et leur grâce est très douce. L’artisan qui les fit aimait d’une particulière tendresse les roses et les fraises, Il en a mis partout. Et probablement afin de mieux témoigner son admiration pour ces choses exquises, il les a follement grossies. Les fraises ont la dimension d’une tête d’enfant, les roses sont larges comme des assiettes. Puis, il s’est appliqué à les très bien faire, de sorte que les générations n’ignorassent pas combien étaient bonnes les fraises de ses printemps et, suaves à remuer le cœur, les roses de son jardin. Ah ! ces bons ouvriers de jadis, qui mettaient toute leur patience, et leur piété à rendre un peu éternels les humbles objets qui leur