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un voyage

Écrasé de fatigue, il croit que ses joies tapageuses ne pourraient à présent lui donner que déception. Le beau paysage où il se promène à pas lents ne le rend plus heureux. Il ne sait ce qui le rendrait heureux. Et puis il guérit complètement, oublie ces impressions morbides, se remet à faire du bruit par les rues, à rêver de gloire. Une troupe d’Assisiates va, avec Gauthier de Brienne, combattre pour le pape. François se joint à eux. Il est tout éperdu en songeant aux rencontres où il fera merveille. Et surtout il s’occupe de s’habiller avec magnificence. Son équipement est si riche, il s’en vante si fort qu’il fâche ceux qui, moins bien mis, vont avec lui. Il part triomphant, et peu de jours après revient très sombre et malade. Que s’est-il passé ? Une vision a commandé qu’il rentrât au logis. C’est du moins ce qu’on racontera plus tard. Il semblerait plutôt que ses camarades, impatients de sa vanité, lui eussent infligé quelque mortification intolérable. On ne sait. Il revient et le vieux Bernardone, qui avait payé armes, chevaux, harnachements et beaux costumes afin que son fils couvrît de gloire la famille, le vieux Bernardone n’est pas content. François ne s’en soucie guère. La terrible mélancolie de sa convalescence est revenue, il lui appartient tout entier. Ses désordres lui font peine et honte. Il voudrait leur échapper, échapper à lui-même. Il hésite, cherche, dans une grande solitude intime. Les pauvres, parmi lesquels il passe de plus en plus sa vie, l’aiment, comme un riche bienfaiteur, non comme un frère ;