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encore. Mon oncle se dirigea d’abord vers ce lieu fréquenté par le peuple, et que j’ai découvert depuis s’appeler les Ombres, mais il en ressortit aussitôt, et frappa enfin à la porte d’une maison particulière, dans une des rues qui partent de Saint-James. Elle fut ouverte jalousement et refermée sur-le-champ. Je restai dehors. Qu’était-ce que cette maison ? Tandis que j’attendais devant la porte, quelques autres hommes s’approchèrent et frappèrent un petit coup sec ; elle s’ouvrit de nouveau jalousement, et ils entrèrent à la dérobée. Un agent de police passa et repassa.

« Ne vous laissez pas tenter, jeune homme, me dit-il en me regardant fixement. Suivez mon conseil et rentrez chez vous.

— Qu’est-ce donc que cette maison ? demandai-je en frissonnant à ce sinistre conseil.

— Oh ! vous le savez bien.

— Non ; je suis nouveau à Londres.

— C’est un enfer, répondit le policeman, convaincu que j’avais dit la vérité.

— Dieu me bénisse ! un quoi ? Il est impossible que je vous aie bien compris !

— Un enfer !… une maison de jeu.

— Oh ! » m’écriai-je, et je fis quelques pas. Le capitaine Roland, lui si austère, si économe, si pauvre, pouvait-il être un joueur ? La vérité se fit jour tout à coup : l’infortuné père cherchait son fils ! Je m’appuyai contre le mur et me contins pour ne pas éclater en sanglots.

Bientôt j’entendis ouvrir la porte ; le capitaine sortit et se dirigea vers notre maison. Je courus devant et rentrai le premier, à l’inexprimable satisfaction de mon père et de ma mère, qui ne m’avaient pas vu depuis le déjeuner, et que cette longue absence avait consternés. Je supportai de bonne grâce leurs reproches. Je prétendis avoir flâné et perdu mon chemin, demandai quelque chose à souper, et me glissai dans mon lit.

Cinq minutes après, le pas fatigué du capitaine retentissait lourdement dans l’escalier.