Page:Bulwer-Lytton - Aventures de Pisistrate Caxton.djvu/166

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— À accepter une offre que lady Ellinor m’a faite de la part de M. Trévanion. Il a besoin d’un secrétaire, et, passant par-dessus mon inexpérience, il a eu la bonté de dire que je ferais son affaire et que je serais bientôt au courant. Lady Ellinor, continuai-je avec dignité, dit que ce serait pour moi un beau début dans la vie politique. Dans tous les cas, mon cher père, je verrai beaucoup de monde, et ce que j’y apprendrai me sera plus utile, je crois, que tout ce qu’on m’enseignerait au collège. »

Ma mère regarda mon père avec anxiété. « Ce sera en effet une bonne chose pour Sisty, » dit-elle timidement. Puis prenant courage, elle ajouta : « C’est précisément le genre de vie pour lequel il est fait.

— Hem ! » fit mon oncle.

Mon père essuya ses lunettes d’un air rêveur et répondit après une longue pause :

« Peut-être avez-vous raison, Kitty ; je ne pense pas que Pisistrate soit fait pour l’étude ; l’activité lui conviendra mieux. Mais à quoi mène cet emploi ?

— Aux fonctions publiques, répondis-je hardiment, au service de ma patrie.

— S’il en est ainsi, dit Roland, je n’ai pas un mot à dire. Mais j’aurais cru que, pour un garçon de cœur, un descendant des vieux Caxton, l’armée aurait…

— L’armée ! s’écria ma mère en joignant les mains et regardant involontairement la jambe de bois de mon oncle.

— L’armée ! répéta mon père avec humeur. Dieu me bénisse ! Roland, on dirait, selon vous, que l’homme n’est fait que pour servir de but aux balles ! Vous ne voudriez pas entrer dans l’armée, Pisistrate ?

— Oh ! non, mon père, du moment que cela fait de la peine à ma chère mère et à vous ; autrement…

— Papæ ! interrompit mon père, tout cela vient de ce que vous avez donné à ce garçon ce nom fâcheux et ambitieux, madame Caxton ! Un Pisistrate pouvait-il être autre chose qu’une calamité ? Cette idée de servir sa patrie, c’est Pisistratus ipsissimus tout entier. Si jamais j’ai un autre fils, Dii meliora ! il n’a qu’à s’appeler Érostrate pour mettre le feu à Saint-Paul, qui, soit dit en passant, fut, je crois, construit dans l’origine avec les pierres du temple de Diane ! Assuré-