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l’ai certainement chagriné. Comment pouvais-je supposer qu’il y avait une si grosse hypothèque sur sa propriété ?

— N’a-t-il pas payé les dettes de son fils ? N’est-ce pas la raison pour laquelle…

— Oh ! interrompit ma mère presque en pleurs, voilà ce qui troublait Roland ; et moi, ne l’avoir pas deviné ! Que faire ?

— Recommencer vos calculs, chère mère, et le laisser agir à sa guise.

— Mais alors votre oncle va périr d’ennui, et votre père n’aura aucune distraction, quand vous voyez qu’il a perdu son ancien intérêt pour ses livres ! Et Blanche ! et vous aussi ! Si nous ne fournissons que la somme apportée par Roland, je ne vois pas comment, avec 260 livres par an, nous pourrons jamais recevoir nos voisins ! Je voudrais savoir ce que dit Austin ! J’ai presque eu idée… non, je vais examiner avec Primmins le livre de comptes. »

Ma mère s’en alla toute triste, et je restai seul.

Je contemplai alors la noble grand’salle, majestueuse encore dans sa décadence et son abandon. Et les rêves dont j’avais commencé à nourrir mon cœur passèrent sur moi et m’entraînèrent loin, bien loin, dans la terre d’or où l’espérance appelle la jeunesse. Rétablir la fortune de mon père ; ressouder les anneaux de cette ambition brisée qui avait uni son génie avec le monde ; rebâtir ces murailles tombées ; cultiver ces landes stériles ; rendre son éclat à l’ancien nom ; réjouir la vieillesse du soldat ; être pour les deux frères ce que Roland avait perdu : un fils ! tels étaient mes rêves ; et en me réveillant je trouvai qu’ils avaient laissé en moi un grand dessein, un but fixe ! Rêve donc, ô jeunesse, rêve des projets nobles et courageux, et tes rêves seront des prophètes !