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sinistre. Quel isolement ! pas une maison, pas une cabane dans le voisinage. Si ceux qui tenaient l’auberge étaient gens à prêter leur connivence à des scélérats, à laisser l’innocence en proie au désespoir… il n’y avait pas de voisins qu’un cri pût alarmer… pas de secours à attendre. L’endroit était bien choisi.

Les portes de l’auberge étaient fermées. Il y avait de la lumière dans la chambre d’en bas ; mais les volets des fenêtres du premier étage étaient fermés. Mon oncle s’arrêta un moment et dit au postillon :

« Connaissez-vous la porte de derrière de cette habitation ?

— Non, monsieur ; je ne passe pas souvent par ici. Ce sont des nouveaux venus qui ont pris l’auberge, et j’ai entendu dire que leurs affaires n’allaient pas très-bien.

— Frappez à la porte. Cependant nous nous tiendrons un peu à l’écart. Si quelqu’un vous demande ce que vous voulez, dites simplement que vous voulez parler au domestique, que vous avez trouvé une bourse. Tenez, vous montrerez la mienne. »

Roland et moi, nous étions descendus de cheval, et mon oncle m’entraîna contre le mur à côté de la porte. Voyant que mon impatience se soumettait mal à ce qui me semblait de vains préliminaires :

« Chut ! me dit-il, s’il y a quelque chose à cacher là dedans, on n’ouvrira pas avant d’avoir fait une reconnaissance. Si l’on nous apercevait, on refuserait d’ouvrir, tandis qu’en ne voyant que le postillon, qu’on prendra d’abord pour un de ceux qui ont amené la voiture, on n’aura aucun soupçon. Tenez-vous prêt à entrer dès que la porte sera ouverte. » L’expérience de mon oncle ne le trompait pas. Il y eut un long silence avant qu’on répondît aux sommations du postillon ; la lumière allait et venait rapidement derrière la fenêtre, comme si l’on courait dans l’intérieur. Roland fit signe au postillon de frapper de nouveau ; il frappa deux fois, trois fois, et enfin d’une fenêtre en mansarde sortit une tête, et une voix s’écria :

« Qui êtes-vous ?… que voulez-vous ?

— Je suis le postillon du Lion-Rouge ; je veux voir le domestique de la voiture brune… j’ai trouvé cette bourse.

— Ah ! c’est là tout ? Attendez un moment. »