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CHAPITRE V.

Sans confiance au foyer paternel, sans guide dans le monde.

Alors, se cramponnant vainement à tous les arguments que lui suggérait son bon sens, Roland parla de ce que les hommes doivent au nom de leur père, lors même qu’ils ont jeté de côté tout amour filial ; alors il devint irritable et austère dans son orgueil, lui qui avait toujours été si enjoué, et il dut paraître au fils déjà perverti, peu aimable et peu aimant. Cet orgueil ne fit qu’aggraver le mal, sans avoir aucun bon résultat, car le jeune homme l’adopta, mais en mauvaise part. Il se dit à lui-même :

« Mon père est donc un homme illustre, avec tous ses ancêtres et ses grands mots ! Il a des terres et un château, et pourtant nous menons une vie si misérable et il me laisse manquer d’argent ! Mais si ces hommes morts sont un sujet d’orgueil pour lui, ils doivent l’être pour moi aussi. Ce logis, cette manière de vivre, est-ce là ce qui convient à un gentilhomme, comme il m’appelle toujours ? »

Même en Angleterre, le sang bohémien se manifesta, et le jeune homme trouva, Dieu sait où et comment, des camarades vagabonds. Des figures bizarres, remarquables par un costume éclatant et râpé, d’une élégance de mauvais aloi, le guettaient au coin de la rue, ou jetaient un coup d’œil vers sa fenêtre, s’esquivant à l’aspect de Roland. Roland ne pouvait descendre au métier d’espion ; et le cœur du fils s’endurcit de plus en plus vis-à-vis du père, et le visage du père n’eut plus de sourire pour le fils. Bientôt arrivèrent des notes à payer ; des créanciers frappèrent à la porte. Des notes et des créanciers à un homme qui frémissait à la pensée d’une dette, comme l’hermine à la vue d’une tache sur sa fourrure ! Et le fils répondait sèchement aux remontrances :

« Ne suis-je pas gentilhomme ? c’est là ce qui convient aux gentilshommes. »