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je lui portais ne me poussât à faire connaître à ses parents le lieu de son séjour. Il pria donc Trévanion de ne pas faire mention de lui, au cas où il aurait occasion de m’écrire. Trévanion le lui promit, non sans répugnance ; mais la confidence qui venait de lui être faite semblait exiger cette promesse. Cependant, comme il détestait toute espèce de mystère, cet aveu aurait pu devenir fatal à Vivian, et celui-ci, sous des auspices aussi équivoques, n’aurait point conquis dans la maison de Trévanion l’intimité à laquelle il aspirait, sans une circonstance qui lui ouvrit cette maison comme s’il avait fait partie de la famille.

Vivian avait toujours gardé, comme un trésor, une boucle de cheveux de sa mère, boucle coupée à son lit de mort. Le premier argent qu’on avait mis à sa disposition, au temps où il logeait chez son précepteur français, avait été consacré à l’achat d’un médaillon sur lequel il avait fait graver son nom et celui de sa mère. Cette relique, il la portait partout avec lui, et, dans les plus cruelles angoisses de la misère, la faim même n’avait pu le forcer à s’en séparer. Un matin, le ruban auquel était suspendu ce médaillon en or vint à se rompre ; le regard de Vivian s’arrêta sur les noms qui y étaient gravés, et le vague sentiment qu’il avait du droit, tout imparfait qu’il fût, lui fit penser que son traité avec son père l’obligeait à effacer ces noms. Dans cette intention, il remit le médaillon à un joaillier de Piccadilly, auquel il donna ses instructions, sans remarquer une dame qui se trouvait au fond de la boutique. Après le départ de Vivian, le médaillon resta sur le comptoir ; la dame s’avança, l’examina et lut les noms qui devaient être effacés. Elle avait été frappée du son de voix de Vivian, et le soir même M. Gower reçut de lady Ellinor Trévanion un billet par lequel elle demandait à le voir. Il obéit avec surprise. Elle lui présenta le médaillon en souriant et lui dit : « Il n’y a qu’un seul homme au monde qui s’appelle de Caxton… à moins que vous ne soyez son fils… Ah ! je vois maintenant pourquoi vous cherchiez à vous cacher de mon ami Pisistrate. Mais comment cela se fait-il ? se peut-il que vous soyez brouillé avec votre père ? Confiez-vous à moi, ou je croirai de mon devoir de lui écrire. »

Ainsi surpris, Vivian ne put dissimuler. Il ne vit d’autre alternative que de confier son secret à lady Ellinor, et d’im-