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Puis la douce voix retentit de nouveau, joyeuse et grisollante comme celle de l’alouette : tantôt elle chante un couplet de romance, tantôt elle s’adresse avec enjouement à son noir ami. Elle lui dit quelque chose qui doit lui faire dresser les oreilles, car je saisis ces mots : « Il revient à la maison ! »

Dans mon embuscade, au milieu des ronces et des ruines, je ne puis voir le soleil se coucher ; mais je sens que son disque est descendu sous l’horizon ; je le sens à l’air qui fraîchit et au silence plus profond du crépuscule.

La douce voie s’est tue. Et la guetteuse descend lentement la colline par le flanc opposé ; elle échappe à ma vue. Le crépuscule a perdu tout charmé pour moi. Elle glisse à travers les ruines, le long de la cour désolée. « Ah ! cœur bon et fidèle ! ne deviné-je pas le souvenir qui te conduit ? Je traverse le guichet, je descends dans le vallon, je longe les lauriers, et je vois ton visage tourné vers les étoiles, ce même visage qui se cachait contre mon cœur au moment douloureux de notre séparation… Sur la pierre tumulaire où nous étions assis, il y a de longues années, moi jeune homme, toi petite fille, c’est là, ô Blanche, que s’abandonne à mon regard ta figure charmante, plus charmante que tout ce qu’avait osé rêver l’exilé.

« Blanche, ma cousine !… Ah ! voilà nos âmes de nouveau confondues au milieu des morts… Lève les yeux, Blanche, c’est moi ! »


CHAPITRE IV.

« Entrez la première, et préparez-les, chère Blanche. J’attendrai devant la porte. Laissez-la entr’ouverte, afin que je puisse les voir. »

Roland est adossé contre le mur ; une vieille armure est suspendue au-dessus de la tête du vieux soldat. Je n’ai jeté qu’un coup d’œil sur sa joue hâlée, sur son noble front. Je ne vois point de triste changement, point de nouveau signe de dépérissement. Au contraire, Roland paraît plus jeune que lorsque