Page:Bulwer-Lytton - Le Maître d’école assassin, 1893.djvu/15

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

puisse commettre. Vous voudrez donc bien m’écouter avec patience, si étant inhabile comme je le suis, privé d’amis, n’ayant point d’avocat pour me conseiller, je tente de vous soumettre quelques arguments pour ma défense. Je n’ai que peu de chose à dire, et cette brièveté même sera ma meilleure défense.

» Mylord, l’ensemble de ma vie est en opposition directe avec l’accusation. Quel est l’homme qui, connaissant à fond tout mon passé, peut m’imputer aucun vice, aucun crime ? Non, je n’ai point formé de projets de fraude, je n’ai point entrepris d’acte de violence, je n’ai fait tort à aucun, dans sa personne ou dans ses biens. Mon existence s’est écoulée dans un labeur honnête, mes nuits ont été consacrées à l’étude la plus appliquée. Cet éloge que je fais de moi-même n’a rien de présomptueux, rien qui choque la raison. Quel homme, après toute une vie de tempérance, après des années employées à penser et à agir droitement, et sans qu’on ait à lui reprocher le moindre écart dans sa conduite, est capable de se précipiter du premier coup dans l’abîme du crime, et d’en atteindre aussitôt toute la profondeur ? L’homme ne se corrompt pas soudainement ; le crime est précédé par des fautes dont la culpabilité va par degrés ; ce n’est que pas à pas qu’on descend.

» Si ma vie, considérée dans son ensemble, contredit l’accusation, ma santé, à l’époque dont il s’agit, la contredit bien plus fortement encore. Peu de temps auparavant j’étais alité, après avoir traversé une longue et cruelle maladie.