Page:Bulwer-Lytton - Le Maître d’école assassin, 1893.djvu/68

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dans le silence de la nuit, j’ouvris à son appel la porte de ma demeure solitaire, et à la clarté de la lune qui avait été le témoin de ce complot inoubliable, je revis mon complice après tant d’années écoulées. Le temps, et toute une vie de débauche avaient changé, endurci, dégradé tout son être, et je me savais retombé soudain au pouvoir d’un tel homme. Il passa cette nuit sous mon toit. Il était pauvre, je lui donnai tout ce que j’avais sur moi. Il me promit de quitter cette partie de l’Angleterre, de ne plus chercher à me revoir.

Le lendemain je ne pouvais plus supporter mes propres pensées. La secousse avait été trop brusque, elle avait amené un flot trop troublé, trop rapide d’émotions troublantes, d’agitation, de tourments. Pour chercher du soulagement, je me réfugiai dans la maison que m’avait offerte le père de Madeleine. Mais vainement je m’efforçai par le vin, par la conversation, par la présence d’êtres humains, par des services que je leur rendais, de conjurer le spectre qui avait surgi de la tombe ouverte par le temps ; je ne tardais pas à retomber dans mes pensées. Je résolus de m’envelopper une fois de plus dans la solitude de mon cœur. Mais je ne veux pas répéter ce que j’ai déjà dit, en anticipant sur ce qui me reste à raconter. J’avais pris une résolution ; elle était vaine. Le destin avait décidé que la vie de la pauvre Madeleine se flétrirait sous l’ombrage vénéneux de mon amour. Houseman vint de nouveau me trouver ; cette fois il me montra les côtés humiliants du