Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/122

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de ma porte, quand je fus accosté, sur le ton le plus lamentable, par un pauvre vieux mendiant, qui paraissait réduit à la plus profonde misère et dans un état de santé déplorable. Malgré mes principes en fait de charité, je me laissai émouvoir par ce spectacle déchirant jusqu’à lui faire l’aumône. Je mis la main à la poche ; plus de bourse. Je cherche de l’autre côté, et voilà que mon mouchoir, mon portefeuille, un médaillon en or qui avait appartenu à Mme Danville avaient disparu de compagnie.

Ce qui prouve qu’il ne faut pas faire société avec ces messieurs à double vertu, et qu’on leur paie bien les compliments qu’ils vous font sur votre bon sens.

Le mendiant continuait de m’importuner.

« Voulez-vous lui faire servir à manger et lui donner un petit écu », dis-je à mon hôtelière.

Deux heures après, elle vient à moi toute troublée : « Ah ! monsieur, ma théière d’argent… c’est ce gueux de mendiant ! »

Un trait de lumière vint m’éclairer… « Ah ! M. Job Jonson ! m’écriai-je dans une rage indescriptible. Laissez-moi tranquille, madame ; laissez-moi. » Je ne pus en dire davantage, j’étais hors de moi. Et qu’on ne vienne pas me dire que la honte est la compagne de la faute. Le scélérat qui a fait le mal n’est jamais aussi honteux de lui-même que l’innocent qu’il a trompé.