Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/121

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jamais de mon nom, et en vérité, je n’ai jamais rien fait pour le déshonorer. Jamais je n’ai fréquenté une mauvaise compagnie, jamais je ne me suis livré à une crapuleuse débauche ; tout ce que j’ai exécuté en vertu de ma profession, je l’ai fait d’une manière supérieure, en véritable artiste, et non en truand comme tant d’autres aventuriers. De plus, j’ai toujours eu du goût pour la littérature polie, et je me suis même mis quelque temps en apprentissage chez un libraire, uniquement pour lire les ouvrages qu’il publiait, avant qu’ils fussent en vente. En un mot je n’ai négligé aucune occasion de développer mon esprit, et le pis qu’on puisse dire contre moi, c’est que je me suis trop bien rappelé mon catéchisme ; je me suis donné tout le mal possible « pour apprendre à travailler sérieusement de manière à gagner ma vie et faire mon devoir dans la position où il a plu à la Providence de m’appeler en ce monde. »

— J’avais souvent entendu dire, répondis-je, qu’il y a de l’honneur parmi les voleurs, mais je suis bien aise d’apprendre de votre bouche qu’ils ont aussi de la religion : vos parrain et marraine doivent être fiers d’avoir tenu sur les fonts un filleul qui a si bien profité du baptême.

— Ils doivent l’être en effet, monsieur, car c’est par eux que j’ai commencé mes tours d’adresse. L’histoire en est un peu longue, mais, si jamais vous désirez l’entendre, je me ferai un plaisir de vous la raconter.

— Merci, merci ! en attendant, il faut que je vous souhaite le bonjour. Voici votre chemin à droite. Je vous renouvelle mes remerciements d’avoir bien voulu condescendre à accompagner un individu aussi ordinaire que mon humble personne.

— Oh ! ne parlez pas de cela, Votre Honneur. Je serai toujours trop heureux de faire route avec un gentleman de bon sens comme vous. Adieu, monsieur, au plaisir de vous revoir ! »

Là-dessus M. Jonson prit son chemin et nous nous séparâmes.

Je m’en revins à la maison, en rêvant à mon aventure, charmé de mon aventurier. Je n’étais plus qu’à trois pas