Page:Bulwer-Lytton - Pelham, 1874 tome II.djvu/148

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mieux à la gaîté qu’un cheval ardent. Je ne m’étonne pas que l’Empereur romain ait fait un consul de son coursier. C’est à cheval que je sens toujours le mieux ce dont je suis capable, que j’apprécie le mieux mes ressources. C’est à cheval que je conçois toujours mes plans les plus subtils et que je devine le mieux les moyens d’exécution. Donnez-moi seulement un bout de bride et l’espace libre devant moi, et je suis Cicéron-Caton-César. Démontez-moi : une fois à pied, je redeviens une simple motte de cette terre que vous me condamnez à toucher : le feu, l’énergie, la substance éthérée se sont envolés ; je suis la terre sans le soleil, le tonneau sans le vin, les habits sans l’homme.

Je retournai au logis l’esprit remonté et l’âme recueillie ; j’arrachai ma pensée aux soucis de ma propre situation, pour l’arrêter sur ce que lady Roseville m’avait dit de l’intervention de Réginald Glanville en ma faveur. Cet homme extraordinaire continuait toujours à exciter puissamment mon intérêt ; et je ne pouvais, sans être ému des sentiments les plus doux, songer aux efforts qu’il avait faits pour ma cause, efforts que je n’avais pas sollicités et qui me seraient restés inconnus, sans la communication de lady Roseville. Quoique les agents de la justice fussent encore activement occupés à la poursuite du meurtrier de Tyrrel, et que les journaux fussent toujours pleins de conjectures sur leur peu de succès, la curiosité publique avait commencé à se refroidir sur cette affaire. Je m’étais trouvé une ou deux fois dans la société de Glanville lorsque ce meurtre avait été mis sur le tapis, et j’avais examiné de près sa tenue en présence d’un sujet qui devait le toucher si cruellement. Cependant je n’avais pu remarquer ni confusion ni changement extraordinaire dans sa contenance ; peut-être ses joues pâles le devenaient-elles un peu plus, son œil rêveur, plus distrait encore, ses pensées errantes plus vagues qu’auparavant ; mais combien d’autres causes que le crime supposé pouvaient expliquer des signes aussi douteux et aussi futiles !

« Bientôt vous saurez tout. » Ces dernières paroles qu’il m’avait adressées, résonnaient encore à mes oreilles ; et avec la plus grande ardeur mes désirs allaient au-de-