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çons. Mais l’indifférence qu’il avait témoignée à l’égard de Dawson semblait rendre cette probabilité très-faible. Les avantages d’une communication sincère et franche étaient plus apparents : Job, dans ce cas n’aurait plus lieu de craindre que sa sûreté ne fût mise en jeu, et si je réussissais à lui démontrer qu’il avait plus d’intérêt à servir l’innocent que le coupable, j’aurais à l’instant à ma disposition, non-seulement tous les renseignements qu’il pouvait posséder présentement, mais encore son expérience et son adresse pour trouver de nouvelles preuves, ou me suggérer au moins des idées utiles. De plus, en dépit de ma vanité et de la bonne opinion que j’avais de ma propre pénétration, j’étais obligé de confesser qu’il n’était pas vraisemblable que mon interrogatoire eût beaucoup de succès avec un vieux renard et un pécheur endurci comme M. Jonson. « Employez un voleur pour prendre un voleur », est un de nos plus sages proverbes, et l’on sait que les proverbes sont la sagesse des nations ; c’est ce qui me décida à ne rien lui cacher.

Tirant ma chaise près de Jonson, et fixant mes yeux sur son visage, je commençai par esquisser rapidement la situation de Glanville (dont je lui cachai seulement le nom), et les accusations de Thornton. J’exposai mes propres soupçons contre l’accusateur, et mon désir de découvrir Dawson, que Thornton me semblait mettre sous le séquestre avec beaucoup d’habileté. Enfin je conclus par une promesse solennelle, que si celui qui m’écoutait pouvait, par son zèle, ses efforts, son talent ou ses expédients, nous aider à convaincre les hommes qui, j’en avais l’assurance étaient les vrais meurtriers, il y gagnerait immédiatement une pension de trois cents livres par an.

Tout le temps que je mis à lui exposer la chose, le patient Job se tint muet et tranquille, fixant les yeux à terre, sans faire voir autrement que par l’élévation accidentelle de ses sourcils qu’il prît le plus mince intérêt au récit. Lorsque cependant, je touchai à la péroraison qui se terminait si délicatement par la mention d’une pension annuelle de trois cents livres, un changement visible s’opéra sur le visage de M. Jonson ; il se frotta les mains