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Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 1.djvu/204

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DÉVELOPPEMENT DE L’INDIVIDU.

plus tard, Giovanni della Casa professe une doctrine beaucoup plus sévère et plus méticuleuse dans ses conseils pour former aux bonnes manières[1] ; relativement aux conséquences, il veut qu’on bannisse entièrement des mois plaisants et des facéties l’idée d’un triomphe personnel. Il est le héraut d’une réaction qui devait se oroduire fatalement.

En effet, l‘Italie était devenue une école de blasphème comme on n’en a pas vu une seconde depuis, même dans la France de Voltaire. Ce n’était pas le scepticisme qui manquait à cet écrivain et à ceux de son école ; mais où le dix-huitième siècle aurait-il pris des victimes dignes de son ironie ? où aurait-il trouvé ces figures innombrables, aussi grandes qu’originales, ces célébrités de tout genre, hommes d’État, prêtres, inventeurs, explorateurs, savanis, poètes et artistes dont l‘originaiité s’imposait à l’admiration de tous ? Au quinzième et au seizième siècle celte phalange existait, et à côté d’elle la culture générale avait produit toute une légion de beaux esprits sans portée, de critiques méchants, de Zoïles sans pudeur, dont l’envie réclamait ses hécatombes ; ajoutez à cela la jalousie qui excitait les uns contre les autres les hommes célèbres. Il est avéré que ce sont les philologues qui ont commencé à s’entre-déchirer ; tels sont ; Filelfo, le Pogge, Lorenzo Valla, etc. ; les artistes du quinzième siècle, au contraire, quoique rivaux par le talent, vivent en bonne intelligence entre eux, ce dont l’histoire de l’art peut prendre acte.

Comme nous l’avons dit, Florence, ce grand centre des grands hommes, devance pendant quelque temps, sous ce rapport, toutes les autres villes. « Œil perçant,

  1. Galateo del Casa, ed. Venez. 1879, p. 28 ss., 48.