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Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 1.djvu/224

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LA RÉSURRECTION DE L’ANTIQUITÉ.

Transtévère ; pourtant la splendeur profane de la Rome antique les passionne plus que les souvenirs du monde chrétien ; une femme vénérable, aux vêtements en lambeaux, — c’est Rome elle-même, — leur raconte sa glorieuse histoire et leur décrit minutieusement les triomphes d’autrefois[1] ; puis elle promène les étrangers par toute la ville et leur explique les sept collines et une foule de ruines — che comprender potrai, quantofui bella !

Malheureusement cette Rome des papes d’Avignon et des pontifes schismatiques n’était déjà plus, à beaucoup près, relativement aux souvenirs de l’antiquité, ce qu’elle avait été quelques générations auparavant. Un acte de vaadalisrae qui a dû ôter leur caractère aux édifices les plus considérables qui existaient encore, c’est celui que commit le sénateur Braucaleone (1257) en faisant raser cent quarante-six maisons fortifiées qu’habitaient des grands de Rome ; la noblesse s’était certainement installée dans les ruines les plus hautes et les mieux conservées[2]. ÎNcanmoins il en restait encore infiniment plus que cc qui subsiste aujourd’hui, et notamment beaucoup d’édifices avaient sans doute encore à cette époque-là leurs

  1. Dittamondo, II, cap. iii. Ce tralL rappelle encore en partie les images naïves des rois mages et de leur suite. La description de la ville, 11, XXXI, n’est pas tout à fait sans valeur au point de vue archéologique (Gregorovius, VI, p. 697, note 1). — Suivant ie Polisiore (MURAT., XXIV, cot. 845), Nlcolô Cl Hugo d’Este firent en 1368 le voyage de Rome ; per œdere queiie magnijicemsc antichc, ehe alpresentt si pouono vtdere i» Roma.
  2. Gregorovius, V, 316 ss. — On trouve ici incidemment une preuve du fait que l’étranger même regardait au moyen âge Rome comme une carrière : le célèbre abbé Suger, qui (vers H40) cherchait de grands fûts de colonnes pour l’édifice qu’il faisait construire à Saint-Denis, ne songeait â rien moins qu’à faire transporter en France les monolithes en grauit des Thermes de Dioclétien, mais heureusement il changea d’idée. Sugerii hbMus aller, dans Dochesne, Hist. Franc, scriptores, IV, p. 352. — ChailCinagne avait été certainement plus discret.