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Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 1.djvu/226

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LA RÉSURRECTION DE L’ANTIQUITÉ.

marbre en chaux se fait toujours[1] ; « c’est une infamie, dit-il ; car les édifices modernes sont pitoyables, et ce que Rome a de beau, ce sont les ruines[2] ». Les habitants de la ville, avec leurs manteaux campagnols et leurs bottes, faisaieut aux étrangers l’effet de bouviers, et, dans le fait, le bétail venait paître jusque dans les Banchi ; les seules circonstances où l’on se réunit, c’étaient les processions ; c’est aussi à cette occasion que se montraient les belles femmes.

Dans les dernières années du pontificat d’Eugène IV (mort en 1447), Blondus de Forli écrivit sa Roma instaurata, en se servant déjà de Frontin et des anciennes monographies, ainsi que d’Anastase, paraît-il. Son but n’est pas de décrire ce qui existe, mais plutôt de restaurer par la pensée ce qui a disparu. Comme il le dit dans la préface de ce livre dédié au Pape, il se console par les belles reliques des saints, que Rome possède[3]. Avec Nicolas V (1447-1455), le goût des monuments, qui distingue la Renaissance, monte sur le trône pontifical. Par suite de l’importance de la ville et des embellissements qu’on y faisait sans cesse, les ruines se trouvaient menacées ; mais, d’autre part, la gloire delà vie éternelle, dont elles étaient le plus précieux ornement, commandait de les respecter. Pie II a la passion des antiquités ;

  1. Fabaoni, Cosmuf, Adnot, 86. Extrait d’une lettre d Alberto degli Alberti à Jean de Médicis. Des témoignages et des plaintes semblables se trouvent réunis dans Gregorovius, VII, p. 557. Sur l‘état de Rome sous Martin V, voir Platina, p. 277 ; pendant l’absence d’Eugène IV, v. Vespasiano, Fiorini., p. 21.
  2. R<ma instaurata, ouvrage écrit en 1447 et dédié au Pape ; imprimé pour la première fois à Rome en 1474.
  3. Compar. ses distiques dans Voigt, Renaissance de îaraxquitè, n 275 note 2. Il est, d’autre part, le premier pape qui lance une bulle pour la protection des monuments (4 Kal, Maj. 1462) et qui édicté des peines contre ceux qui les dégraderaient. mesures ne servirent à rien ; compar. Gregorovius, VU, p. 558 ss.