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Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 1.djvu/315

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CHAPITRE IX. — LATINISATION GÉNÉRALE DE LA CULTURE.

sus des saints, il paraît tout simple et tout naturel que les familles nobles donnent aux fils les noms d’Agameranon, d’Achille et de Tydée[1], que le peintre nomme son fils Apelle et sa fille Minerve, etc.[2]. L’adoption d’un nom harmonieux, emprunté à l’antiquité, pour remplacer un nom de famille qu’on n’aime pas à porter, est tout aussi facile à justifier. On renonçait volontiers à un nom géographique, qui avait l’inconvénient de désigner toute une classe de citoyens et qui n’était pas encore devenu nom patronymique, quand en même temps il devenait incommode comme nom de saint ; c’est ainsi que Filippo de S. Gemignano prit ie nom de Callimaque. Celui qui, après avoir été méconnu et offensé par sa famille, s’illustrait comme savant à l’étranger, pouvait être fier, même s’il était un Sanseverino, d’échanger son nom contre celui de Julius Pomponius Lætus. De même la traduction d’un nom en grec et en latin (dont l’usage se répandit presque exclusivement en Allemagne) est excusable chez une génération

  1. BURSELLIS, Ann. Bonon., dans MuRAT., XXÏII, col. 898.
  2. Vasari, XI, p. 189, 257, Vite di Sod<ma edi Garofalo. À Rome, ce turent naturellement les femmes de mœurs légères qui s’emparèrent des noms les plus ronflants de l’antiquité, tels que ceux de Julie, Lucrèce, Cassandre, Porcia, Virginie, Penthésilée, sous lesquels elles figurent dans Arétin. il est possible que les Juifs aient adopté en ce temps-là les noms des grands ennemis des Romains, de ceux qui appartenaient à la race sémitique, tels que ceux d’Amilcar, d’Annibal, d’Asdrubal, qu’ils portent encore si fréquemment à Rome. (Cette dernière observation ne saurait subsister. Pour les premiers temps Zuns ne connaît pas de semblables noms de Juifs, Leipzig, 1837, nouvellement imprimé sous le titre : Recueil des écrits de Zuns, t. II, Berlin, 1876 ; Steinsghiveider, dans son : Il Buonarrotti, Ser. II, vol. VI, 1871, p. 196-199, ne connaît pas de Juif qui ait porté un de ces noms ; même aujourd’hui, d’après les renseignements pris par le prince Buoncompagni auprès de M. Taglîacopo. employé aux Archives israélires à Rome (lettre à M. le docteur M. Steinschneider, déc, 1876), il n’y a que quelques Juifs qui portent le nom d’Asdrubal, et pas un qui porte celui d’Amilcar ou d’Annîbal.