Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 2.djvu/175

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mates Léonard construisit dans la suite pour embellir les réceptions faites aux rois de France comme seigneurs de Milan. Même des villes moins considérables se distinguaient parfois par l’éclat de leurs fêtes. Lorsque le duc Borso (t. I, p. 62) vint à Reggio[1] pour recevoir l’hommage de cette ville (1453), il trouva aux portes une grande machine au-dessus de laquelle semblait planer saint Prosper, le patron de la cité ; le saint était abrité par un baldaquin tenu par des anges ; à ses pieds se trouvait une plaque tournante portant huit anges ; deux de ces derniers montèrent vers le saint pour lui demander les clefs de la ville et le sceptre, qu’ils remirent ensuite au duc, et, pendant que cela se passait, les anges et le saint prononcèrent des discours où ils louaient l’illustre visiteur. Ensuite venait un échafaudage mis en mouvement par des chevaux invisibles, qui portait un trône vide ; derrière ce siège se tenait la Justice avec un génie destiné à la servir ; aux quatre coins de l’échafaudage on voyait quatre vieux législateurs, entourés de six anges portant des drapeaux ; sur les deux côtés figuraient des cavaliers revêtus d’armures complètes, ayant aussi des drapeaux à la main. Il est inutile de dire que le génie et la déesse ne laissèrent point passer le duc sans lui adresser leurs harangues. Une deuxième voiture, qui semblait traînée par une licorne, portait une Charité qui tenait un flambeau allumé ; on n’avait pas voulu se refuser l’antique plaisir de faire figurer entre ces deux allégories une voiture en forme de vaisseau, qui était mise en mouvement par des hommes cachés. Ces trois machines prirent la tête du cortège ; mais devant l’église de Saint-Pierre il

  1. Annal. Estens., dans Murat., XX, col. 468 ss. La description n’est pas claire ; de plus, elle a été imprimée d’après une copie incorrecte.