Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 2.djvu/321

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CHAP. IV.—MÉLANGE DE SUPERSTITIONS ANTIQUES, ETC. 317 ce sont îes montagnes de ce pays. Il est vrai que le maître du magicien a une fois béni un livre dans le voisinage de l’ab )aye de Farfa, mais il s’est produit à cette occasion des difficultés qu’on ne rencontrerait pas près de Norcia ; de plus, les paysans de la contrée étaient des gens sûrs, avaient quelque pratique de ces choses et pouvaient, en cas de besoin, prêter un concours sérieux. L excursion n’eut pas lieu, sans quoi Benvenuto aurait probablement appris à connaître les acolytes du fripon. En ce femps- !à ce pays était vraiment légendaire. Arétin dit quelque part d’une fontaine ensorcelée que ses bords sont la demeure des sœurs de la sibylle de Norcia et de la tante de la fée Morgane. Vers la même époque, le Trissin, dans son grand poëme épique *, célébrait cet endroit avec un luxe extraordinaire de poésie et d’allégorie comme la patrie des oracles et des prédictions. La célèbre bulle d’innocent Vlïl (1484)® inaugura, comme on le sait, un affreux système de persécutions contre les sorcières, mais elle ne fit que -donner plus d exlc. ; sion à ta sorcellerie. Des Dominicains allemands en forciri les principaux promoteurs ; aussi rAüemagne eut- > VUaVa Uherata da’ Goti, canto XIV. On peut se demander si le Trissin lui-raôme croit encore à la possibilité de sa description ou s’il s’agit déjà d’un élément du romantisme pur. Il est également permis d’élever les mêmes doutes an sujet de son modèle probable Lucain (chant VIj, où la sorcière thessalienne évoque un mort pour faire plaisir à Sextus Pompée.

  • Séptimo Decretal., lib. V, tit. XII. Elles commencent par ces

mots : Summis daiderantes affectihus, etc. Je Crois devoir faire observer en passant qu’en y regardant de près tome idée d’un état de choses renouvelé de l’antiquité, d’un reste de croyances païennes, disparaît ici. Celui qui voudra se convaincre que l’imagination des moines mendiants est la source unique de toutes ces observations, n’a qu’à suivre dans les m moires de Jacques du Clerc le procès des Vaudois d’Arras (en ti59). Ce n’est que par cent ans de procès qu’on amena l’imagination populaire à trouver toutes naturelles les pratiques incrimjnées.