Page:Burckhardt - La civilisation en Italie au temps de la Renaissance. Tome 2.djvu/43

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Si nous ne nous trompons, Fiammetta est un pendant féminin à la Vita nuova de Dante, ou du moins elle a été inspirée par cet ouvrage.

Les poëtes antiques, surtout les poëtes élégiaques et le quatrième livre de l’Énéide, n’ont pas été sans influence [1], sur les Italiens de cette époque et sur ceux des âges suivants, cela va sans dire ; mais c’est surtout en eux-mêmes qu’ils trouvent la source de l’émotion. Si on les compare sous ce rapport à leurs contemporains étrangers, on reconnaîtra qu’ils ont les premiers exprimé d’une manière complète le sentiment moderne en général. Il s’agit ici de savoir, non pas si des hommes distingués d’autres nations n’ont pas connu des émotions aussi profondes, aussi poétiques, mais qui a le premier prouvé par des faits qu’il avait la sérieuse et pleiue connaissance des mouvements de l’âme.

Mais pourquoi les Italiens de la Renaissance sont-ils restés médiocres dans la tragédie ? Chez eux on pouvait représenter sous mille formes la fortune, l’esprit, le caractère, la passion grandissant, luttant, succombant tour à tour. En d’autres termes, pourquoi l’Italie n’at-elle pas produit de Shakespeare ? — Car les Italiens étaient bien capables de porter leur scène à la hauteur de celle des peuples du Nord ; d’ailleurs ils ne pouvaient pas concourir avec le théâtre espagnol, parce qu’ils ne connaissaient pas le fanatisme religieux, qu’ils n’admettaient le point d’honneur abstrait que pro forma, et qu’ils étaient

  1. Le célèbre Léonard Arétin, en sa qualité de chef de l’humanisme au commencement du quinzième siècle, estime ehe gli antichi Greci dumanita e di genUÎezza di cuore aèbino avansato di gran iunga i nostri Ualiani^ mais il le dit au début d’une nouvelle qui raconte l’histoire langoureuse du prince Antiochus malade et de sa belle-mère Stratonice, et qui, par conséquent, renferme une preuve équivoque et, de plus, à moitié asiatique. (Imprimé entre autres comme appendice des Cento Novefh antieke )