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Page:Burckhardt - Le Cicerone, 1re partie, trad. Gérard, 1885.djvu/120

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la Chimère de bronze, se trouvent au nouveau Museo Etrusco de Florence [a]. Au Collegio Romano à Rome [b] dans les collections de Volerra [c] et de Cortone [d], ainsi qu’au Musée de Naples (dernière salle des petits bronzes) [e], sont réunis aussi beaucoup d’objets étrusques.

Celui qui visite les principaux emplacements où des fouilles ont été faites, les vieilles nécropoles de Corneto, Toscanella, Cervetri, Vulci, Chiusi etc., trouvera encore bien des choses en leur lieu et place, chez des particuliers, et pourra en outre se faire une idée des magnifiques sépultures de ce peuple mystérieux[1]. Ce qui rend toujours précieuses aux chercheurs du beau ces collections et d’autres encore, ce sont les nombreux restes isolés et les traits de l’art grec qu’ils apercevront au milieu des débris étrusques et qu’ils démêleront dans ces débris mêmes. Au Museo Etrusco du Vatican [f] on a joint, par exemple, une superbe collection de vases peints, dont à peine la moitié provient des fouilles étrusques, et dont une bien faible partie relève de l’art étrusque proprement dit ; en général, ces vases sont l’œuvre de peintres sur argile de la Grèce ; mais la grande salle du musée renferme, entre autres trésors, un coffre d’airain ovale avec des Combats d’Amazones [g] en relief[2] et un choix de miroirs ornés de dessins linéaires en creux, d’un beau style qui paraît grec. Le célèbre coffre rond appelé Coffre de Ficoroni, exposé au Collegio Romano, et représentant le Débarquement des Argonautes et le Châtiment d’Amylcos vaincu au pugilat [h], une des plus belles œuvres de l’antiquité pour la composition et le dessin, est presque de style grec, tandis que l’inscription et certains détails, indiquent la main d’un artiste latin et une origine romaine.

Le classement qui suit des sculptures antiques d’après les types n’a en aucune manière la prétention d’être le seul possible ou même d’être particulièrement méthodique, mais c’est le fil conducteur le plus commode. La valeur de l’exécution plastique, dont le profane ne sait bien juger qu’après de longues études, n’est pas notre criterium dans le dénombrement qui va suivre ; on doit ici avoir plus d’égard à la pensée, au motif. Nous ne craindrons pas de citer même des travaux insignifiants ou d’une époque tardive, s’ils se trouvent être les seuls exemplaires connus, ou accessibles au public, de telle idée excellente d’un artiste antique. Ce sont les idées, même dans leur manifestation la plus défectueuse, s’il n’en reste point de meilleure, dont il faut à tout prix s’enrichir la mémoire, sans pour cela négliger de jeter un regard sur l’exécution.

  1. Si, au Museo Etrusco, la vue des têtes de terre cuite à la lèvre supérieure allongée et au menton d’une raideur particulière fait penser au type national de beaucoup d’Anglais, nous avouerons que cela nous est arrivé et d’autres personnes aussi.
  2. Devant ce merveilleux meuble de toilette, qui était placé dans le tombeau d’une femme étrusque d’un rang élevé, on est porté à se rappeler le célèbre coffre de Kypselos dont la forme supposée, d’après la description de Pausanias, donne tant à penser.