Page:Burckhardt - Le Cicerone, 1re partie, trad. Gérard, 1885.djvu/20

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taines et génoises des xviie et xviiie siècles. Des convenances d’éditeur ont fait plus tard réunir dans une même et première partie tout ce qui concernait l’art antique ; mais le principe de la composition n’a pas été affecté. Ce principe est d’abord de suivre à travers les siècles les vicissitudes d’un art ; puis de placer chaque œuvre à sa date et en son lieu, de façon à ce que la description de l’œuvre serve elle-même à cette suite de l’histoire et s’accommode avec l’ordre géographique adopté. Soit, par exemple, en architecture, le gothique italien. Burckhardt indique d’abord brièvement les principaux caractères du genre. Puis il le suit, à travers l’histoire, dans chaque région où graduellement il se développe : à Assisi, à Arezzo, à Sienne, à Orvieto, à Lucques, à Pise, à Padoue, à Vérone, à Venise, à Milan, à Pavie, dont les monuments sont successivement décrits, avec mention des artistes et des écoles. Soit encore, en sculpture, le xve siècle. Cette histoire de la première Renaissance a ses étapes : Florence d’abord, avec Nanni di Banco, Ghiberti, Donatello, Verrocchio, les della Robbia ; puis Sienne, Bologne, Milan et Pavie, Venise enfin, avec Leopardi et les Lombardi. Burckhardt les suit, il va avec l’histoire de ville en ville, il s’arrête devant les œuvres et médite la vie des maîtres. Soit enfin, en peinture, le même xve siècle. Ici encore, c’est à Florence que sont les origines avec Masaccio, Fra Filippo Lippi, Sandro Botticelli ; puis c’est l’école d’Ombrie avec Signorelli et le Pérugin, Padoue avec Mantegna, Bologne avec le Francia, Venise avec Antonello de Messine, les Bellini et Carpaccio. Tantôt c’est le plan topographique qui l’emporte dans la section de peinture surtout, où les écoles se divisent plus nettement d’après les rivalités de régions et de villes ; tantôt c’est l’ordre historique qui prévaut, dans les époques de tâtonnement et dans les siècles de décadence particulièrement, où l’individualité des artistes est comme sacrifiée aux tendances générales du temps. Mais partout le travail d’exécution est difficile ; et il a fallu une rare souplesse d’esprit, une mémoire agile, une entente profonde de la perspective littéraire, une réelle concision de style, pour étendre sur une même œuvre ce réseau d’une triple méthode. J’ajoute, et ce n’est pas le moindre mérite, que le lecteur n’a pas le sentiment d’une telle