Page:Burnett - Le Petit Lord.djvu/91

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

je ne sois peut-être pas très bon juge. Je crois seulement que vous le trouverez un peu différent de nos enfants anglais.

— Je n’en fais pas de doute, dit le comte en poussant un grognement, car son pied lui faisait sentir un élancement ; c’est une sorte d’impudent petit misérable, comme tous ces enfants américains.

— « Impudent », n’est pas précisément le terme, reprit M. Havisam de son même ton sec et coupant. C’est un mélange de maturité et d’innocence enfantine, qui a quelque chose de particulier.

— Américaine impudence ! insista le comte. On me l’a toujours dit. Ils appellent cela précocité et liberté. Grossièreté, rudesse, impudence ; voilà ce que c’est ! »

M. Havisam ne crut pas devoir répliquer. Il tenait rarement tête à son noble patron, surtout quand la noble jambe de son noble patron était enflammée par la goutte. Il trempa de nouveau ses lèvres dans le porto.

« J’ai un message à délivrer de la part de Mme Errol, dit-il en replaçant le verre sur la table.

— Je ne me soucie pas de ses messages, grommela Sa Seigneurie ; moins j’entendrai parler d’elle, mieux cela vaudra.

— Il a une certaine importance, reprit l’homme de loi. — Elle préfère ne pas accepter la rente que vous lui offrez, » dit-il après un moment de silence.

Le comte tressaillit.

« Qu’est-ce que cela signifie ? s’écria-t-il.

— Elle prétend qu’elle n’en a pas besoin et que ses relations avec vous ne sont pas assez affectueuses…