Page:Burney - Evelina T1 1797 Maradan.djvu/363

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à mon aise sans cavalier. Cette ineptie ne me parut pas digne de réponse. Je me laissai entraîner machinalement malgré moi, et nous nous engageâmes assez avant dans une longue allée foiblement éclairée. Nous étions presque arrivées au bout, quand nous fûmes accostées par une troupe de jeunes gens. Leur démarche, leurs cris et leurs éclats de rire nous annoncèrent qu’ils étoient pris de vin : ils nous entourèrent de manière que nous ne pûmes ni avancer ni reculer. Les demoiselles Branghton poussèrent des cris, et j’étois excessivement effrayée ; mais ces messieurs se moquèrent de notre peur : l’un d’eux s’avisa de me prendre rudement par le bras, en me disant que j’étois une jolie petite créature.

J’eus le bonheur de me dégager d’entre ses mains, et je me sauvai en grande hâte pour rejoindre la compagnie que j’avois eu l’imprudence de quitter ; mais avant que je pusse atteindre mon but, je fus arrêtée par une autre troupe d’hommes, dont l’un me coupa le chemin, en s’écriant : « Où courez-vous si vîte, ma belle » ? Un autre me retint par la main.

Effrayée et hors d’haleine, j’eus à peine la force d’articuler quelques pa-