Page:Burney - Evelina T1 1797 Maradan.djvu/57

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m’appercevoir de la ridicule figure que je faisois ; mais j’étois trop hors de moi pour penser ou pour agir convenablement.

Si le lord n’avoit été de retour dans un clin d’œil, je me serois peut-être échappée une seconde fois. Il m’apporta un verre de limonade. Dès que je l’eus pris, il me dit qu’il se flattoit que je lui accorderois l’honneur de ma main pour la danse qu’on venoit de commencer.

Le souvenir de la conduite puérile que j’avois tenue auparavant, fit renaître mes craintes plus que jamais. Je tremblois de danser devant tant de monde, et avec un homme de ce rang. Je crois qu’il remarqua mon embarras, car il me supplia de reprendre ma place, si la danse ne m’amusoit pas : je n’eus garde d’accepter la proposition, car je n’avois déjà fait que trop de sottises ; à peine cependant pouvois-je me soutenir sur mes jambes.

Préparée de la sorte, il est aisé de s’imaginer que je me tirai très-mal d’affaire. Je m’attendois à voir le lord outré de la mauvaise étoile qui l’avoit guidé dans son choix ; mais, à ma grande consolation, il parut assez content ; il m’avoit aidée et encouragée de son mieux.