Page:Burney - Evelina T1 1797 Maradan.djvu/61

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demoiselle de votre âge à commettre une impolitesse ».

Une idée confuse me passa alors par la tête, que je pouvois avoir manqué à quelque usage reçu dans les grandes assemblées. Je me rappelois, en effet, d’avoir entendu autrefois, qu’après avoir refusé un cavalier, il n’en falloit plus accepter. Étourdie que j’étois ! je l’avois oublié. Je demeurois interdite ; et tandis que cette idée me poursuivoit, mylord Orville répondit avec chaleur : « Monsieur, cette dame n’est pas capable de mériter un tel reproche ».

Cet homme insupportable (car, en vérité, je suis très en colère contre lui) fit une profonde révérence ; et avec un souris grimacier des plus choquans, il répondit : « Mylord, loin de faire un reproche à madame, j’ai assez de discernement pour reconnoître le mérite supérieur qui vous a valu la préférence». Il fit une seconde révérence, et s’en alla.

Y eut-il jamais quelque chose d’aussi insolent ? Je mourois de honte. « Le fat » ! s’écria mylord Orville ; et moi, sans savoir ce que je faisois, je me levai de ma chaise fort à la hâte ; et en m’en allant, je disois : « Où donc peut