Page:Burney - Evelina T1 1797 Maradan.djvu/76

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

accepter le bras, tarde tant à venir profiter de cette faveur ».

Je me sentis très-embarrassée, et je proposai à madame Mirvan de nous asseoir ; elle eut la bonté d’y consentir. Le capitaine prit sa chaise à côté de la sienne ; et l’inconnu ayant jugé à propos de nous suivre, se mit à ma droite.

« Quelle insensibilité ! madame, continua-t-il ; vous manquez la plus belle danse du monde : cet homme doit avoir perdu la tête ; qu’en pensez-vous vous-même » ?

« Rien du tout », répondis-je avec un peu de confusion.

Il me fit excuse de la liberté de sa remarque, en ajoutant : « Je ne reviens pas de mon étonnement ; peut-on être jusqu’à ce point ennemi de soi-même ? Mais, où peut-il être, madame ? a-t-il quitté la salle ? ou n’y a-t-il pas été du tout» ?

« En vérité, repris-je avec humeur, je n’en sais rien ».

« Je ne m’étonne plus, madame, de vous voir émue ; rien n’est plus choquant. Voilà la plus belle partie de la soirée perdue. Il ne mérite pas que vous l’attendiez ».