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DU BUDDHISME INDIEN.

« Une action antérieure ne périt pas ; elle ne périt pas, qu’elle soit bonne ou mauvaise ; la société des sages n’est pas perdue ; ce qu’on dit, ce qu’on fait pour les Âryas[1], pour ces personnages reconnaissants, ne périt jamais.

« Une bonne action bien accomplie, une mauvaise action méchamment faite, quand elles sont arrivées à leur maturité, portent également un fruit inévitable.

« C’est ainsi que parla Bhagavat ; et transportés de joie, les Religieux, les Religieuses, les Dévots de l’un et de l’autre sexe, les Dêvas, les Nâgas, les Yakchas, les Gandharvas, les Asuras, les Garuḍas, les Kinnaras, les Mahôragas et l’assemblée tout entière approuvèrent ce que Bhagavat avait dit. »

J’ai cité ce morceau parce qu’il a pour objet de rehausser le mérite de la première des cinq vertus transcendantes que l’homme doit pratiquer pour atteindre à la perfection suprême, vertu qui se nomme Dâna pâramitâ ou la perfection de l’aumône. C’est un des sujets qui reviennent le plus souvent dans les textes ; nous possédons en effet un grand nombre de légendes où l’aumône est recommandée, et où l’on établit même qu’elle doit aller, chez celui qui l’exerce, jusqu’au sacrifice de la vie ; j’aurai plus tard occasion d’y revenir. En ce moment, ce qui nous importe, c’est d’étudier la forme des Sûtras en les comparant à quelques autres traités analogues de la collection népalaise. Et d’abord je dois remarquer que la plupart des autres traités qui ont le même titre ne diffèrent de celui de Kanakavarṇa que par les vertus qui y sont célébrées. Comme dans notre Sûtra, Çâkya y recommande la pratique des devoirs, objet de son enseignement, et il en montre l’importance par le récit des mérites dont elle assure la possession à ceux qui s’y sont conformés. Le plus souvent il appuie sa doctrine du récit des événements qui sont arrivés, à lui ou à ses disciples, dans une vie antérieure, admettant, comme les Brâhmanes, que tous les êtres sont condamnés, par la loi de la transmigration, à passer successivement par une longue suite d’existences où ils recueillent le fruit de leurs œuvres bonnes ou mauvaises. Des Sûtras de ce genre ressemblent beaucoup aux légendes proprement dites, et ils n’en diffèrent que par des caractères extérieurs peu importants. Un Sûtra commence toujours par cette formule : « Voici ce qui a été entendu par « moi, » tandis que cette formule manque à tous les Avadânas que je connais. On doit dire ensuite que la légende forme le fonds et la matière propre de l’Avadâna, tandis qu’elle n’est que l’accessoire du Sûtra et qu’elle n’y figure que pour confirmer, par l’autorité de l’exemple, l’enseignement du Buddha, enseignement qui est par lui-même indépendant du récit fait pour l’appuyer. À part ces diffé-

  1. Il sera parlé de ce titre dans la section de la Discipline.