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INTRODUCTION À L’HISTOIRE


des Anâgâmins. Quelques-uns étant entrés dans la vie religieuse, obtinrent l’état d’Arhat, par l’anéantissement de toutes les corruptions ; d’autres firent croître les semences qui devaient un jour produire par eux l’Intelligence des Çrâvakas, ou celle des Pratyêka Buddhas. Enfin, cette réunion tout entière fut absorbée dans le Buddha, plongée dans la Loi, entraînée dans l’Assemblée. Quand Bhagavat eut ainsi disposé cette réunion d’hommes, il se leva de son siége et se retira.

Ils sont heureux les hommes qui, dans le monde, cherchent un refuge auprès du Buddha ; ils parviendront au Nirvâṇa, pour prix des respects qu’ils lui auront témoignés.

Ceux qui rendront, ne fût-ce que quelques honneurs, au Djina[1], chef des hommes, après avoir habité les divers cieux, obtiendront le séjour immortel[2]. »

Les succès de Çâkya excitaient cependant la jalousie de ses adversaires, et l’on rencontre dans le Divya avadâna plus d’une trace des sentiments de joie avec lesquels les Brâhmanes accueillaient l’espérance de le voir vaincu. Une légende déjà citée m’en fournit un exemple auquel j’ai fait plus haut allusion, mais seulement en passant. Çâkya avait prédit à un marchand qu’il aurait un fils qui devait se faire Religieux buddhiste. Un Brâhmane, que le marchand consulte, interprète d’une façon insidieuse cette prédiction ; et le marchand, effrayé de l’avenir, veut faire avorter sa femme, qui meurt par suite de ses tentatives. Quand les Brâhmanes de Râdjagrĭha apprennent que cette femme est morte, ils se répandent par la ville et vont dans les rues et sur les places publiques, rappelant la prédiction faite par Çâkya, l’accusant de mensonge et d’impuissance, et terminant ainsi leurs discours : « Maintenant, voilà cette femme morte : voilà qu’on la transporte au cimetière de la froide forêt ; celui qui n’a pas même la racine de l’arbre, comment pourrait-il avoir des branches, des feuilles et des fleurs ?[3] » Cela n’empêche pas le Buddha de sauver l’enfant que la mère portait dans son sein ; mais pour nous de pareils dé-

  1. Voy. les additions, à la fin du volume.
  2. Prâtihârya sûtra, dans Divya avad., f. 69 b sqq. man. Soc. Asiat., f. 88 a sqq. de mon man. Bkah-hgyur, sect. Hdul-va, vol. da ou XI, p. 230 sqq. Csoma, Asiat. Res., t. XX, p. 90. La version tibétaine diffère notablement du texte sanscrit, et de plus l’exemplaire du Kahgyur qui la renferme est ici très-mal imprimé et presque illisible. Cette difficulté, jointe à ce que le tibétain m’est moins familier que le sanscrit, m’a privé de l’usage de cette version. La fin de ce morceau est manifestement altérée dans nos deux manuscrits ; de plus, elle renferme des allusions à des idées qui ne reparaissent pas ailleurs : c’est, de tous les Sûtras, le plus difficile que j’aie encore rencontré.
  3. Djyôtichka, dans Divya avad., f. 131 a.