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DU BUDDHISME INDIEN.


tique. Les légendes n’expliquent nulle part le terme d’Upâsaka, et il est en lui-même assez vague pour qu’on puisse douter s’il ne serait pas préférable de le traduire par serviteur, et d’y voir un nom du novice placé sous la direction d’un Religieux, auquel il rend en quelque sorte les devoirs de la domesticité. Cette interprétation faciliterait grandement l’idée qu’on devrait se faire de la composition de l’Assemblée de Çâkya, qu’on se représenterait ainsi comme formée de Religieux et de novices des deux sexes, en un mot des quatre réunions dont parlent nos textes sanscrits[1]. Ajoutons que la manière dont les auteurs de nos dictionnaires tibétains traduisent dge-bsñen (qui remplace le sanscrit upâsaka)[2], favoriserait cette interprétation, puisque suivant Csoma ce mot signifie catéchumène, et suivant M. Schmidt, « élève, novice, laïque remplissant des devoirs religieux. » Mais la lecture attentive des textes, et quelques autorités non moins respectables à mes yeux que celles que je viens de citer, m’ont décidé en faveur du sens de dévot ou fidèle.

Je remarque d’abord que le sanscrit classique prend aussi souvent le mot upâsaka dans le sens d’adorateur que dans celui de serviteur ; cela tient aux éléments mêmes dont est composé ce mot, qui signifie « être assis auprès ou au-dessous. » Secondement, les Buddhistes du Sud, c’est-à-dire ceux de Ceylan et d’Ava, ne l’entendent pas d’une autre manière ; et une des autorités les plus imposantes, quand il s’agit du sens propre des termes buddhiques, M. Turnour, le traduit tout à fait dans ce sens : pour lui upâsaka signifie « dévot, celui qui vit auprès du Buddha, ou avec le Buddha[3]. » Judson, l’auteur du Dictionnaire barman, va même un peu plus loin, un peu trop loin peut-être, quand il traduit ce mot par laïque[4] ; mais il faut se rappeler qu’il parle d’un peuple entièrement converti au Buddhisme, et chez lequel celui qui n’est pas Religieux ne peut être qu’un laïque, surtout aux yeux d’un Européen. Enfin les Chinois, qui, comme je l’ai souvent remarqué, suivent en général la tradition du Nord, se font exactement la même idée du mot upâsaka que les Buddhistes du Sud. « Le terme Yeou pho se, selon M.  A. Rémusat, signifie purs, et indique que, bien que ceux qui le portent restent dans leur maison, c’est-à-dire mènent une vie laïque, ils observent les cinq préceptes et gardent une conduite pure. On rend aussi leur nom par hommes qui approchent du devoir, pour exprimer qu’en accomplissant les préceptes, il se rendent propres à recevoir la loi des Buddhas[5]. » Dans une énumération des diverses

  1. Tchatasrĭṇâm parchadâm, dans Avad. çat., f. 77 b, 88 a, 101 b.
  2. Avad. çat., f. 121 a, comparé au Bkahhgyur, sect. Mdo, vol. ha ou XXIX, fo 207 b.
  3. Mahâvanso, Index, p. 27, édit. in-4o.
  4. Burman Diction., vo Upâsaka, p. 45.
  5. Foe koue ki, p. 180.