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DU BUDDHISME INDIEN.

Cependant le roi se rendit à l’ermitage de Kukkuṭa ârâma, et s’adressa ainsi au Sthavira Yaças : Voici quel est mon désir ; je voudrais pouvoir établir le même jour et à la même heure les quatre-vingt-quatre mille édits de la Loi. Qu’il soit ainsi, répondit le Sthavira ; j’aurai soin, pendant ce temps-là, de cacher le disque du soleil avec ma main. Le Sthavira Yaças exécuta en effet ce qu’il avait promis ; et le même jour, à la même heure, les quatre-vingt-quatre mille édits de la Loi furent établis. C’est ce qu’exprime cette stance :

Ayant retiré les reliques du Rĭchi des sept constructions anciennes, le descendant des Mâuryas fit élever le même jour, dans le monde, quatre-vingt-quatre mille Stûpas, resplendissants comme les nuages d’automne.

Comme le roi Açôka avait établi quatre-vingt-quatre mille édits de la Loi, il devint un roi juste, un roi de la Loi ; aussi lui donna-t-on le nom de Dharmâçôka, l’Açôka de la Loi. C’est ce que dit cette stance :

Le respectable Mâurya, le fortuné, fit dresser tous ces Stûpas pour l’avantage des créatures ; auparavant il se nommait sur la terre Tchaṇḍaçôka ; cette bonne œuvre lui valut le nom de Dharmâçôka[1].

Il n’y avait pas encore bien longtemps que le roi était favorablement disposé pour la loi du Buddha, et déjà, chaque fois qu’il rencontrait des fils de Çâkya, soit dans la foule, soit isolés, il touchait leurs pieds de sa tête et les adorait. Il avait pour ministre Yaças, qui était plein de foi en Bhagavat ; Yaças dit au roi : Seigneur, tu ne dois pas te prosterner ainsi devant des mendiants de toutes les castes. En effet les Crâmaṇêras de Çâkya sont sortis des quatre castes pour entrer dans la vie religieuse. Le roi ne lui répondit rien ; mais à quelque temps de là, il s’adressa ainsi à tous ses conseillers réunis : Je veux connaître la valeur de la tête des divers animaux ; apportez-moi donc, toi telle tête, et toi telle autre. Puis il dit à son ministre Yaças : Toi, apporte-moi une tête humaine. Quand toutes les têtes furent apportées, le roi leur dit : Allez et vendez toutes ces têtes pour un prix quelconque. Toutes les têtes furent vendues, excepté la tête humaine, dont personne ne voulut. Le roi dit donc à son ministre : Si tu n’en peux avoir d’argent, donne-la pour rien à qui la voudra ; mais Yaças ne trouva pas d’acquéreur. Alors le ministre, honteux de n’avoir pu se défaire de

    tants, nous voyons par le précédent paragraphe que le principe de distribution suivi par Açôka était de donner un vase de reliques à chaque ville qui possédait dix millions de pièces. À ce compte Takchaçilâ eût dû recevoir trente-six vases ; mais pour se débarrasser de cette demande exagérée, le roi déclare que le chiffre de dix millions est de rigueur, et qu’il faut l’atteindre, mais non le dépasser, pour avoir droit à un vase. (Voy. les additions, à la fin du volume.)

  1. Le récit est interrompu ici dans nos manuscrits par le titre de Pâm̃çu pradâna avadâna, ou « La légende de l’aumône d’une poignée de terre. » Mais la narration se continue régulièrement, et il est clair que cette division est uniquement une affaire de forme.