Page:Burnouf - La Science des religions.djvu/136

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Mais, cela fût-il démontré, il n’en demeurerait pas moins que le christianisme fut en Occident une révolution morale qui s’étendit à tous les hommes, et que cette révolution procéda par la voie religieuse et non par celle de la philosophie. C’est là toute la question.

Il est certain qu’avant le christianisme il n’y avait pas, dans le monde occidental, un enseignement moral populaire se présentant sous une forme religieuse et constituant une partie de la foi. Il n’y eut pas dans l’état religieux du monde gréco-romain une période d’élaboration morale correspondant au brahmanisme ; le christianisme, venu du dehors, y succéda sans transition aux anciens cultes, à peu près comme si la prédication du Bouddha était venue sur la fin de la période védique. Le christianisme eut donc dès l’origine le caractère d’une révolution morale ; c’est ce qu’atteste l’évangile de saint Mathieu. Plus tard, vers la fin du second siècle, il commença à développer sa métaphysique, qui, dans les discussions des Pères avec les philosophes d’Alexandrie, atteignit à la hauteur où ces disciples de Platon et de l’Orient la portèrent eux-mêmes. Mais quelle qu’ait été et quelle que soit encore aujourd’hui la métaphysique chrétienne, la véritable influence du christianisme et sa véritable grandeur résident dans l’action morale qu’il exerce.

Ainsi, plus on remonte la série des temps, plus on voit chez les peuples âryens la religion étrangère à la morale. Quand on s’arrête soit au Vèda, soit au polythéisme des peuples occidentaux, on ne trouve presque plus dans la religion que ses deux éléments essentiels : le dieu, le rite.

La même réduction s’opère relativement au sacerdoce. Il n’y a pas de système social où l’ordre des prêtres ait été constitué suivant une hiérarchie plus solide