Page:Burnouf - La Science des religions.djvu/16

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rites grossiers forment l’autre ; c’est à lui que se rapportent les dogmes tels quels qui la constituent.

Ainsi, la science constate que, si la croyance en un dieu est un des éléments trouvés par elle dans toute religion, il n’importe pas, pour qu’une religion se forme et dure, que l’on ait de ce dieu une idée très-haute. On voit même que, dans les religions les plus belles, chez les brahmanes, les bouddhistes et les chrétiens, un grand nombre d’hommes se font de Dieu une idée assez basse, sans que pour cela on croie devoir les exclure du nombre des fidèles. Au contraire, une idée de Dieu plus haute que celle des fidèles peut retrancher un homme de leur assemblée, en faisant de lui un hérétique, un impie, un athée, et le mettre à leur égard dans une sorte d’hostilité.

Il est donv bien certain que la conception du dieu est essentiellement et primitivement individuelle ; elle est en proportion de l’intelligence naturelle de chacun et de l’instruction qu’il a acquise. Il n’est pas probable qu’elle puisse s’élever au même niveau chez tous les hommes ; et cependant, la psychologie prétend que la raison, c’est-à-dire au fond l’idée de Dieu, est le caractère distinctif de l’homme, et qu’elle est identique en nous tous. Seulement la science des religions, qui ne procède pas comme la psychologie, constate des différences dans l’usage que les hommes font de leur raison et dans le degré de clarté auquel la notion de Dieu parvient en chacun d’eux. L’un conçoit l’absolu métaphysique, sans couleur, sans forme, sans attributs définis ; un autre ne peut concevoir Dieu que revêtu d’une figure saisissable à l’imagination ; un troisième ne concevra rien au delà de la réalité tangible et présente, et adorera son fétiche.

La notion individuelle de Dieu serait le principe de la religion naturelle, si celle-ci était possible ; mais