Page:Burnouf - La Science des religions.djvu/30

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sorte par voie de réduction, comme font les chimistes et les physiciens. Les parties les plus récentes du culte et les dernières formules du dogme sont éliminées les premières ; plus on avance, plus l’un et l’autre se simplifiant ; la légende du dieu, s’il en a une, se réduit peu à peu à ses éléments les plus anciens ; on se trouve à la fin en présence d’une notion rudimentaire et d’un rite à peine ébauché. Chemin faisant, on a trouvé dans les faits eux-mêmes l’explication des développements locaux d’une religion et des ruptures qui ont pu se produire dans son sein ; on a constaté les influences venues du dehors qui l’ont successivement modifiée, soit par un mélange direct, soit par une sorte de réaction et de lutte contre des idées et des usages qui ne pouvaient être acceptés. Ainsi marche la science des religions : elle remonte le cours des temps, et elle ne fait un pas en avant qu’après avoir assuré celui qu’elle vient de faire ; mais si l’on descendait le cours des temps, il faudrait ou établir d’abord une théorie spéculative et présenter l’esprit humain comme une table rase sur laquelle on ferait apparaître tour à tour les diverses religions, ou commencer par un acte de foi en une révélation primitive et connue. Dans le second cas, on se place en dehors des conditions de la science ; dans le premier cas, on construit l’histoire a priori, ce qui est contraire à la science.

Je sais bien qu’aujourd’hui les recherches des savants portent à la fois sur toutes les parties de l’histoire des religions ; mais la science n’en est pas à ses débuts : les cadres généraux sont tracés, les faits principaux y ont déjà pris leur place, et les études spéciales ont pour but de combler les vides qu’ils laissent encore entre eux. Toutefois, il faut bien reconnaître que les affirmations des savants sont souvent hasardées, soit parce que l’horizon restreint où ils s’enferment les empêche