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de voir l’ensemble de faits, soit parce que l’esprit est plus prompt à affirmer quand il découvre que quand il apprend. Mais la science est à ce prix.

Depuis trente ans, par exemple, nous voyons se reconstituer l’histoire d’une civilisation toute religieuse qui semblait n’avoir pas eu d’histoire. L’Inde paraissait échapper pour toujours à toute chronologie ; mais les indianistes ont suivi la méthode des géologues : ne pouvant fixer des dates, il se sont contentés de reconnaître d’abord les grandes périodes de la littérature et de la civilisation indienne. Les cadres étant formés, nous voyons les livres, les faits, les idées, venir s’y ranger tour à tour ; et, par des synchronismes prudemment rétablis, les grands faits de l’histoire de l’Inde commencent à prendre place dans l’histoire générale de l’humanité. Si l’on avait tenté cette restitution en commençant par le Vêda, vraisemblablement la science eut longtemps encore marché au hasard ; mais le bouddhisme, qui est la dernière forme des religions indiennes, a été le premier étudié scientifiquement[1]. Les grandes dates en ont été reconnues avec une approximation suffisante et ont servi de point de départ pour remonter ensuite le courant brâhmanique ; enfin, le Vêda a été découvert, et c’est sur lui que les études portent en ce moment. Or, le Vêda est la forme la plus antique des religions indiennes et celle qui nous les montre le plus près de leur berceau. Une suite de hasards heureux a fait connaître aux savants européens les livres sacrés de l’Orient dans l’ordre le plus favorable à l’étude. Les livres brâhmaniques, ou la religion indienne apparaît dans sa plénitude, ont été connus les premiers ; ceux du bouddhisme l’ont été plus tard et ont donné les premières dates historiques ; enfin, les

  1. Voyez l’Introduction à l’histoire du Bouddhisme indien, par Eug. Burnouf.