Page:Burnouf - La Science des religions.djvu/55

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rent à usurper par degrés la puissance laïque. Sur la fin du Nouvel-Empire, un véritable clergé se trouvait organisé, qui tint tête au roi lui-même et précipita la décadence politique de l’Égypte.

Il n’y avait pas non plus une caste royale comme dans l’Inde. Il y eut seulement des dynasties. Mais à mesure que les religions locales d’Abydos, d’Héliopolis, de Memphis, d’Han, de Thèbe et d’une foule d’autres cités riveraines du Nil se groupèrent en un vaste système polythéiste, l’effort des lettrés tendit vers l’unité abstraite d’un dieu suprême. La royauté profita de cette tendance ; le roi parut de plus en plus un symbole vivant de la divinité et l’objet légitime d’un culte. L’Égypte adora ses rois. Dès la première dynastie, elle leur offrit des sacrifices, comme elle en offrit bientôt aux taureaux Hapi et Ména. À la fin, le roi célébra sa propre fête ; sur un hiéroglyphe de Ramsès II, (Sésostris), ce roi est représenté prosterné devant son image.

Cette adoration n’avait du reste aucun caractère panthéiste. Le roi n’était pas une incarnation divine. Comme un mort se partageait en trois éléments, son cadavre, son ombre et son âme, ainsi le roi, faisant abstraction de sa personne humaine, adorait comme homme sa propre royauté.

C’est par sa force d’abstraction appliquée aux phénomènes et par ses inductions sans mesure que l’esprit égyptien se manifesta librement pendant plusieurs milliers d’années. C’est par là aussi qu’il exerça une influence religieuse sur les Sémites et notamment sur les Hébreux, dont la civilisation commença lorsque celle de l’Égypte avait dépassé son point culminant. Quand vinrent les peuples de race supérieure, les Perses d’abord, puis les Grecs et les Romains, l’Égypte prêta quelques titres nouveaux au polythéisme en décadence et favorisa la tendance vers l’unité. Autrement elle ne