Page:Burnouf - La Science des religions.djvu/84

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lèges, ; elle est acceptée par beaucoup de brâhmanes à cause de la pureté de sa morale. Mais l’égalité de naissance du çûdra et du brâhmane proclamée par les bouddhistes, le sacerdoce accordé indifféremment à tous les hommes, armèrent bientôt contre la religion nouvelle le parti brâhmanique, conservateur des castes, et, après dix siècles d’existence agitée, le bouddhisme fut chassé de l’Inde, où il n’est jamais rentré depuis.

Le bouddhisme cependant n’ajoutait rien à la notion de Dieu, telle que les brâhmanes l’avaient conçue ; par conséquent il ne pouvait légitimement introduire des rites nouveaux. Son église et sa forte organisation ecclésiastique ne tendaient pas à l’établissement d’une religion plus parfaite : le Bouddha n’était considéré ni comme un dieu ni comme une incarnation d’une divinité quelconque. Dans l’Inde brâhmanique, on ne pouvait donc regarder cette réforme que comme une tentative révolutionnaire aboutissant à la suppression ou du moins à l’amoindrissement du régime des castes. Par la substitution d’un sacerdoce recruté jusque dans les bas-fonds de la société au sacerdoce héréditaire des brâhmanes, qui étaient de purs Aryas, et dont les familles remontaient aux temps védiques de l’invasion, il décapitait le régime des castes et provoquait dans l’Inde une révolution sociale auprès de laquelle nos révolutions d’Occident n’auraient été qu’un jeu. Il arriva donc, comme il arrive malheureusement presque toujours, que la réforme des mœurs fut sacrifiée à la raison d’état : le brâhmanisme survécut, et il dure encore.

Nous avons indiqué le caractère dominant du bouddhisme, né d’une révolution dans les mœurs et non d’un changement radical dans les doctrines. C’est à ce point de vue que la science doit se placer pour apprécier la portée de cette grande religion. Quoique la métaphysique (abhidharma), forme une des trois parties de la collection des écritures bouddhiques, connue sous le nom