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APPENDICE. — No II.

le rincement de la bouche, le bain, l’acte de traire la vache, de faire vomir, de purger, de purger par le haut, de purger par le bas, de purger la tête, d’oindre les oreilles d’huile, de baigner les yeux, de faire éternuer, d’appliquer du collyre aux yeux, d’appliquer les collyres particuliers [à chaque membre], d’employer le morceau de bois [à nettoyer les dents], de faire usage de la lancette, de soigner les enfants, d’employer des médicaments faits avec des racines, d’attacher des herbes médicinales [au corps d’un malade[1]] ; lui au contraire il a de l’aversion pour se faire des moyens d’existence à l’aide d’une science grossière de ce genre et par une vie de mensonge. Cela même lui est compté comme vertu.

« Le Religieux, grand roi, qui est ainsi doué de ces vertus, n’aperçoit de quelque côté que ce soit aucun sujet de crainte, comme serait la crainte venant des restrictions de la morale. Tout de même, grand roi, qu’un monarque de race Kchattriya, consacré par l’aspersion royale, qui a détruit ses adversaires, n’aperçoit de quelque côté que ce soit aucun sujet de crainte, comme serait le danger venant d’un adversaire, de la même manière, grand roi, le Religieux qui est ainsi doué de ces vertus, n’aperçoit de quelque côté que ce soit aucun sujet de crainte, comme serait la crainte venant des restrictions morales. Doué de cette masse sublime de vertus, il ressent un plaisir intérieur que rien ne peut altérer. C’est de cette manière, grand roi, qu’un Religieux est doué de vertu[2].

« Et comment, grand roi, le Religieux ferme-t-il la porte de ses sens ? Ici-bas, grand roi, le Religieux ayant vu la forme avec sa vue, n’en saisit pas le signe, n’en saisit pas le caractère. En effet, voici le sujet de ses réflexions : Si l’organe de la vue n’est pas retenu, s’il se disperse de côté et d’autre, de violents désirs, le désespoir, le péché et les conditions coupables se répandront à sa suite[3]. Alors il parvient à le contenir ; il le surveille ; il arrive à mettre un frein sur l’organe de la vue. De la même manière, ayant entendu le son avec l’ouïe, flairé l’odeur avec l’odorat, goûté la saveur avec le goût, perçu l’attribut tangible avec le corps (le toucher répandu dans tout le corps), connu la loi (ou l’in-

  1. Dans la partie du Dîgha nikâya qui renferme le Brahma djâla, ce morceau est terminé par les mots Mahâsîlam̃ niṭṭhitam̃, « Fin de la grande moralité. »
  2. Après cet exposé, le Subha sutta continue ainsi : « C’est là, jeune Brâhmane, la masse sublime des vertus dont Bhagâvat a fait l’éloge, qu’il a fait accepter à la foule du peuple, dans laquelle il l’a introduite, dans laquelle il l’a établie. — Y a-t-il pour moi ici quelque chose de plus à faire ? C’est une chose surprenante, ô Ânanda [reprit le jeune Brâhmane], c’est une chose merveilleuse, c’est un puissant moyen de succès que cette sublime masse de vertus qui est achevée et non inachevée. Je n’aperçois pas, ô Ânanda, hors d’ici, dans les autres Samaṇas ou Brâhmanes, une masse sublime de vertus aussi achevée ; et si les autres Samaṇas ou Brâhmanes pouvaient voir hors d’ici en eux-mêmes une masse de vertus, aussi achevée, ils n’en seraient cependant satisfaits en aucune manière. C’est assez de cette exposition ; par cette exposition se trouve atteint pour nous le résultat général. — Il n’y a donc pour nous rien de plus à faire ici ? — Cependant, respectable Ânanda, tu t’es exprimé ainsi : Y a-t-il pour moi ici quelque chose de plus à faire ? Quelle est donc, ô Ananda, la masse sublime de méditations dont le bienheureux Gôtama a fait l’éloge, qu’il a fait accepter à la foule du peuple, dans laquelle il l’a introduite, il l’a établie ? »
  3. Le texte se sert, pour exprimer cette idée, du verbe anvâssavêyyum̃, « ils s’écouleraient à la suite ; » je note ici en passant, parce que j’y reviendrai plus tard, le rapport de ce verbe avec le terme d'âçrava, en pâli âsava, « péché, faute, » qui en dérive. (Voy. ci-dessus, p. 288, et plus bas, Appendice, no XIV.)