Aller au contenu

Page:Burnouf - Lotus de la bonne loi.djvu/697

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
656
APPENDICE. — N° X.

crit sam̃pratipâdya, on traduirait avec beaucoup plus d’assurance, « Le bonheur en ce « monde et dans l’autre est difficile à obtenir si ce n’est par, etc. » Mais la véritable forme de ce participe serait peut-être ou sampaṭipadjê, ou encore sam̃paṭipâdayitavê. La désinence ê ne fait pas difficulté, si l’on admet, comme je le proposais tout à l’heure, qu’elle soit celle du nominatif neutre. On voit clairement que le mot am̃nata est pour añata ; en effet, le ña qui à Girnar et à Dhaulî est représenté par un caractère spécial, 𑀜, ne l’est sur les colonnes du centre de l’Inde que par l’anusvâra suivi d’un n dental, de cette manière 𑁦𑀦[1]. Je rends palikhâyâ par le sanscrit parîkchâ, « recherche, étude, » et usâhêna par utsâhêna, « effort, exertion. » J’assigne la valeur de aussi, car, à la conjonction tchukhô, ou khô, pour le pâli et prâcrit khu, est le substitut du sanscrit khalu, comme l’avait bien reconnu Ratnapâla, le Buddhiste que consultait Prinsep. Quant à tchu, c’est probablement la conjonction tcha, dont la voyelle a été changée en u par suite de l’assimilation qu’a exercée la finale de khô. Il est certain d’ailleurs que l’on trouve également tchakhu dans ces inscriptions ; il semble que tcha reste alors entier, parce que l’u de khu, pour khalu, n’a subi de son côté aucune modification. Je doute encore du sens que j’ai adopté pour suvê suvê, où je retrouve le sanscrit svê. Ce mot ne se prête d’ailleurs qu’à une autre interprétation, celle de svaḥ, « demain, » exactement comme en pâli où l’on a suvê : la répétition de ce mot dans notre texte donnerait le sens de « chacun des jours de demain, » chacun des jours qui doivent suivre.

Je regarde ukasâ comme la forme populaire du sanscrit utkarchâḥ, et cette interprétation me paraît décider de celle du mot suivant gêvayâ, ou, suivant une autre leçon, gêm̃vayâ ; mais ce mot est en lui-même difficile, et c’est par conjecture que je le traduis comme je fais. Pour donner à ce sens quelque apparence de vraisemblance, il faut supposer le provincialisme de ê pour â dans gêm̃vayâ qui revient à gâm̃vayâ[2], et la substitution de v (ou b) à m, de façon à retrouver sous gêm̃vayâ le sanscrit grâmyâḥ, en passant par gâm̃mayâ, « les gens des villages. » Cette transformation n’est pas arbitraire, puisqu’elle se trouve déjà dans le mahratte et dans le hindi gâm̃va[3], pour le sanscrit grâma. Le sens qu’elle donne du reste, va bien à l’ensemble du discours, surtout entre les ukasa, « les chefs, » et les madjhimâ, « les hommes de condition moyenne. » Je ne vois plus, d’ailleurs, qu’une autre conjecture qui consisterait à changer gêṅivayâ en gôvâyâ, « les bergers, les pâtres ; » mais ici encore on est obligé de corriger le texte, ressource qui a d’ordinaire plus d’inconvénients que d’avantages. Par le mot pulisâpi mê il faut entendre non les hommes en général, ce qu’on exprime par les mots djanê ou lôké, mais les serviteurs et les gens du roi, ceux qui exécutent ses ordres, c’est, en effet, à eux que s’adresse spécialement cette partie de l’édit.

La phrase suivante depuis alam̃ jusqu’à mahâmâtâpi est encore vague pour moi. J’avais traduit d’abord dans la supposition que palam̃ était pour phalam̃, « fruit, avantage, » le 𑀧 pa et le 𑀨 pha pouvant se confondre, et je supposais que le verbe samâdapayitavê, que je fais rapporter aux gens du roi, devait s’écrire samâdapayitavê ; cette supposition don-

  1. Prinsep, On the Edicts of Piyadasi, dans Journ. as. Soc. of Bengal, t. VII, 1re partie, p. 273.
  2. Lassen, Instit. ling. pracrit. p. 128.
  3. Prem sâgar, p. 13, l. 4, éd. Eastwick.