Page:Busoni - Chefs-d’œuvre poétiques des dames françaises, 1841.djvu/209

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Alors l’aimable Soir, d’une façon tranquille,
Comme de tous le plus docile,
Le prit sur le ton le plus bas,
Et répondit à tous, sans aucun embarras :
« À l’égard de ces biens que le Midi, mon frère,
Prétend lui seul conduire à leur perfection,
Chacun de nous, à sa manière,
Concourt à leur production.
Nul de nous trois ne peut lui seul la faire entière.
Si la vive chaleur du Midi les mûrit,
L’air humide du Soir après les attendrit ;
Et si le Matin les fait croître,
La terre, qui leur donne l’être,
Sans ma fraîcheur et mon serein,
Devenant un ingrat terrain,
Par l’ardeur du Midi, qui la sèche et l’altère,
Ne seroit bientôt plus qu’une impuissante mère.

. . . . . . . . . . . . . . . .


Reste à considérer maintenant l’agréable.
Je ne veux point citer les plaisirs de la table ;
Je vais parler ici de ceux d’un plus haut rang.
C’est moi qui suis le temps des plaisirs de la vie,
Dont le dieu même qui m’entend,
Presque toujours de la partie,
Produit le charme le plus grand.
Sur le brillant gazon d’une verte prairie,
Je rassemble Philis, Amaranthe, Silvie ;
Je fais, par ma fraîcheur, éclater leur beauté ;
Et le charme secret dont leur ame est saisie
En respirant un air plus doux que l’ambroisie,
Leur donne plus d’amour et plus de liberté.
Jamais je ne révèle aucun tendre mystère,
Et mes frères découvrent tout.