Page:Busoni - Chefs-d’œuvre poétiques des dames françaises, 1841.djvu/300

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L’aspect affreux de ces campagnes
Devroient-ils inspirer de si doux mouvemens ?
Ah ! sans doute l’aurore y fait briller encore
Un rayon de ce feu que ressentit pour Laure
Le plus fidèle des amans.
Pétrarque, auprès de vous, soupira son martyre ;
Pétrarque y chantoit sur sa lyre
Sa flamme et ses tendres souhaits ;
Et tandis que les cris d’une amante trahie,
Ou la voix de la perfidie,
Fatiguent nos coteaux, remplissent nos forêts,
Du sein de vos grottes profondes
L’écho ne répondit jamais
Qu’aux accens d’un amour aussi pur que vos ondes.
Trop heureux les amans, l’un de l’autre enchantés,
Qui, sur ces rochers écartés,
Feroient revivre encor cette tendresse extrême ;
Et, dans une douce langueur,
Oubliés des humains qu’ils oubliroient de même,
Suffiroient seuls à leur bonheur !
Mais, hélas ! il n’est plus de chaînes aussi belles :
Pétrarque dans sa tombe enferma les Amours.
Nymphes, qui répétiez ses chansons immortelles,
Vous voyez tous les ans la saison des beaux jours
Vous porter des ondes nouvelles :
Les siècles ont fini leur cours
Et n’ont point ramené des cœurs aussi fidèles.
Ah ! conservez du moins les sacrés monumens
Qu’il a laissés sur vos rivages,
Ces chiffres, de ses feux, respectables garans,
Ces murs qu’il habitoit, ces murs sur qui le temps
N’osa consommer ses outrages.
Surtout que vos déserts, témoins de ses transports,
Ne recèlent jamais l’audace ou l’imposture ;